Les jeunes de Dabola n’entendent pas abdiquer. Ils persistent dans leur opposition à la fermeture de l’huilerie de la ville, décidée par la Compagnie d’exploitation des produits oléagineux (COPOEL-Guinée). Ainsi, dans la suite logique de l’occupation de la mairie de la commune urbaine, le vendredi dernier, ils se sont rendus ce matin d’abord à la préfecture où ils ont vertement signifié leur position aux autorités, Ensuite, prenant d’assaut la route qui mène à la ville de Kankan, ils s’en sont rendus maîtres au point de bloquer la circulation. Et certains d’entre eux que nous avons joints au téléphone clament qu’il en sera ainsi aussi longtemps que les autorités n’auront pas entendu leurs cris de colère.
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Les exigences des protestataires sont sans équivoque : « Notre soulèvement n’est pas que contre le démantèlement en cours. Nous exigeons la reprise pérenne des activités de l’usine », dit un d’entre eux. Et pour se faire entendre, selon un autre, à la suite des préparatifs d’hier, « nous nous sommes tout d’abord rendus ce matin à la préfecture pour aller signifier au préfet que l’Etat, à travers le président de la République, doit signer le protocole d’accord avec la COPOEL-Guinée. Nous lui avons dit ça au mât ». Au-delà de ce message, les manifestants entendaient « cadenasser les locaux de la préfecture ». Mais ils n’ont pu aller au bout parce que les lieux étaient « barricadés par les services de sécurité ».
Aussi, ils se sont rabattus sur la nationale Dabola-Kankan. Conséquence, « depuis le matin, de ce côté de la ville, aucun véhicule n’est ni sorti, ni entré », clame triomphalement un manifestant. Pour le moment, la protestation reste globalement pacifique. Mais les manifestants, nous rapporte-t-on, restent très déterminés. Au point qu’ils jurent de paralyser la ville jusqu’à ce qu’on consente à satisfaire à leurs exigences.
Et si les jeunes affichent une telle témérité, ce n’est pas sans raison. Tout d’abord, l’huilerie dont la fermeture est ainsi au cœur de la crise demeure le poumon économique de la ville, parmi les plus pauvres du pays. Avec sa fermeture, ce sont de nombreux jeunes qui risquent de se retrouver au chômage. A cela on peut ajouter que le 8 juin 2015, en marge d’une tournée qu’il effectuait dans la région, le président de la République, en campagne, y avait notamment déclaré : « nous voulons que l’usine qui peut produire 50.000 tonnes, puisse produire 100.000 tonnes. Mais pour cela, il faut qu’on ait un encadrement des paysans pour qu’on arrive surtout à la production. L’Armée aussi qui a une brigade agricole, va travailler sur les 4.000 hectares qui sont ici pour que l’usine soit suffisamment ravitaillée. La société Castel aussi s’est engagée à passer à 100.000 tonnes et nous, nous sommes engagés à donner à l’usine, la quantité d’arachides dont elle a besoin ».
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Par ailleurs, le 2 mars 2016, au sortir de l’audience que lui avait accordée le chef de l’Etat, Nicolas Bragvin, le Directeur général de COPOEL-Guinée, plein d’optimisme, avait assuré : « Notre ambition et celle du président, c’est d’augmenter la production à la fois pour satisfaire les besoins intérieurs en arachide, également alimenter l’usine pour l’exportation tant d’huile que des graines d’arachide pour avoir une agriculture performante qui soit à la fois pour permettre à l’autosuffisance alimentaire et alimenter les recettes d’exportation du pays ».
Visiblement, après avoir été gavés d’autant d’espoir, les jeunes peinent à se résoudre à la fermeture de l’usine.
Boubacar Sanso Barry