Exploité ou rejeté par des parents, menacé par les féticheurs et autres charlatans, stigmatisé par la société…voilà le cocktail cauchemardesque qui caractérise la vie d’un albinos en Guinée. D’autant que la protection des personnes atteintes de l’albinisme se limite au stade de discours, au plus grand regret des victimes de cet accident génétique.
[rsnippet id= »1″ name= »pub google »]
« Etre albinos serait-il un péché ? », se demande Abdoul Souaré, élève au lycée Yimbaya. Interrogation anodine en apparence, mais qui traduit le profond malaise et l’angoisse permanente qui habitent les albinos de la Guinée. A 17 ans, Abdoul se promène rarement seul en raison des mesures de sécurité imposées par ses parents. « La crainte de finir sacrifié à des fins de sorcellerie habite chaque individu atteint d’albinisme », explique-t-il. Abdoul qui précise que sa méfiance est décuplée en période électorale parce qu’ayant appris que les candidats peuvent être tentés de sacrifier les albinos pour accéder au pouvoir. « Pendant cette période, nous restons confinés chez nous », a-t-il confié
Tout comme lui, Adama Conté, apprenti-coutière, ne se déplace jamais sans être en compagnie d’une personne sûre. Ce, depuis que via une radio locale, elle a appris le viol d’une jeune albinos par un inconnu. « Il semble que des gens cherchent à avoir une relation sexuelle avec une personne atteinte d’albinisme pour avoir la prospérité professionnelle et financières », estime-t-elle. Très diffuse au sein de la société, cette croyance serait un des facteurs explicatifs de nombre de viols dont ses plaignent les femmes atteintes d’albinisme. Plusieurs fois, une albinos d’une trentaine d’années qui a requis l’anonymat, a ainsi rejeté les avances à elle faites par des hommes, estimant que ceux-ci pourraient être animés de l’intention de se servir d’elle pour assouvir leur fantasme pour le matériel. « J’ai du mal à avoir une relation amoureuse en dépit de mes sentiments pour certains jeunes hommes », reconnait-elle.
[rsnippet id= »1″ name= »pub google »]
A cause de l’extrême pauvreté, explique Diarra Condé, sociologue universitaire, il est facile pour les féticheurs d’exploiter et d’entretenir la crédulité des populations. Ainsi, estime-t-il, les albinos doivent se défendre contre les convoitises de féticheurs qui ne reculent devant aucun scrupule pour s’approprier des prétendues vertus que renfermeraient leurs cheveux, leurs doigts ou leurs parties génitales.
La problématique est telle qu’un enseignant chercheur a confié à notre rédaction que les albinos sont stigmatisés dès leur naissance. « Dans certaines localités du pays, les albinos nouvellement-nés sont le plus souvent rejetés par leur père qui les abandonne et accuse leurs mères d’attirer la malédiction sur la famille ou d’avoir eu des rapports extraconjugaux avec des mauvais esprits », déclare-t-il. Aussi, dit-il, en classe, leur vision déficiente rend pénible la lecture au tableau noir et provoque de la part des camarades, railleries, intolérance et même mépris. « La marginalisation devient complète lorsqu’à l’âge adulte, il leur est difficile de décrocher un emploi ».
Sur le plan sanitaire, selon Dr. Edourd Théa, les albinos souffrent de l’absence de mélanine. « Le manque de ce pigment cutané qui protège des rayons ultraviolets, les rend particulièrement vulnérables », dit-il. « Il leur est impératif de se protéger de l’implacable soleil qui provoque sur leur peau de cruelles brûlures ou des ulcères, sinon des cancers de la peau le plus souvent fatals », ajoute-t-il. Mais, s’interroge Daouda Konaté, albinos d’une quarantaine d’années, que faire pour se protéger contre les rayons de soleil lorsqu’il faut forcement chercher son petit-pain. ? Selon lui, les enfants albinos qui mendient chaque jour au niveau des carrefours de Conakry, ne le font pas de plein gré. « A cause de la pauvreté, leurs parents sont obligés de les envoyer trouver de quoi manger le soir », dit-il.
[rsnippet id= »1″ name= »pub google »]
En dépit des campagnes de sensibilisation qui se limitent à des déclarations politique, la situation des albinos inquiète les ONG en charge de la protection des albinos. A en croire, certains des activistes de ces ONG, les autorités devraient accompagner les discours politiques par des actes concrets visant à garantir le bien-être des albinos guinéens.
Gilles Mory Condé