Les examens de fin d’année prennent fin ce samedi. Mais d’ores et déjà, une grosse polémique enfle quant à leur régularité. Beaucoup dénoncent en effet des failles voire des fraudes avérées lors de ces évaluations. L’Observatoire citoyen du système éducatif guinéen (OCSEG) est de ceux qui, estimant que l’ampleur de la fraude est telle que les examens devraient purement et simplement être annulés. . C’est du reste ce que nous dit en substance Aboubacar Mandela Camara un des responsables de la structure, dans l’entretien qu’il a accordé à notre reporter. Et comme on peut s’en rendre compte, il s’en explique.
Comment avez-vous détecté les irrégularités lors de ces examens?
A l’approche des examens, nous avons mis une coordination nationale en place. Cette coordination nationale est composée de 16 membres. Chaque région administrative de la Guinée a un coordonnateur, excepté la zone spéciale de Conakry qui en a 5. A eux, s’ajoute un coordinateur national, un porte-parole que je suis, un secrétaire central et un coordinateur média et réseaux sociaux. Donc, nous avons mis cette coordination en place, et nous avons défini une méthodologie de collecte d’informations. Nous avons copté des jeunes activistes que nous avons formés. Au minimum 114 personnes ont été mobilisées dans le cadre de la collecte des informations concernant le déroulement des différents examens
Quelle est votre méthode pour repérer les irrégularités
Vu que le ministère n’a pas voulu nous donner l’autorisation pour accéder aux centres, nous avons nos propres techniques. Mais, comme les examens ne sont pas encore finis, nous n’allons pas tout dévoiler. L’une des techniques que nous utilisons, c’est l’observation dissimulée. Elle consiste à venir par exemple autour d’un centre, au sein de la population environnante, parmi les groupuscules autour des centres, afin de relayer toute information ou tout constat qui pourrait entacher le bon déroulement des examens.
Donnez-nous quelques exemples pratiques que vous avez détectés sur le terrain…
Moi-même, je suis descendu sur le terrain le jour du lancement du bac. Au collège Carrière, j’ai trouvé un groupe d’enseignants, venus spécialement accompagner leurs élèves. Dans les centres, il y a beaucoup d’élèves issus de différents établissements. Les gens sont payés pour ça. Quand c’est l’épreuve de Français, on fait appel aux meilleurs professeurs qui donnent ce cours. Dès que le sujet est lancé, on le leur en voit par Messenger ou Wathsapp. Eux, ils traitent, puis renvoient le traité via les mêmes canaux. J’ai constaté cet état de fait sur le terrain. Nous avons constaté que même les vendeuses de nourriture dans les centres sont impliquées. Quand ils ne peuvent pas communiquer le traité des sujets par téléphone, ils le donnent aux vendeuses qui, en complicité avec les forces de sécurité, l’introduisent dans la cour du centre. Dans certains centres, j’ai vu que tous les élèves qui sortaient avaient des téléphones. Pire, je suis rentré dans le centre du lycée Aviation où un groupe de filles était en train de plaider pour que le surveillant leur restitue leurs téléphones. C’est pour vous dire qu’il y a eu effectivement usage de téléphone dans les centres.
Quelles sont les causes de ces défaillances?
C’est la mauvaise préparation. C’est la première fois que j’entends qu’on met à la porte un candidat à l’examen d’entré en 7ème année parce qu’il n’a pas envoyé de cahier de brouillon. A Dalaba par exemple, on a dit à un candidat d’aller acheter son cahier de brouillon. Si tu n’achètes pas un cahier de brouillon, on te menace de ne pas être reçu dans la salle le lendemain. Quand vous prenez le BEPC et même le Bac, il n’y avait pas de photos sur certaines cartes de candidats. Ce qui veut dire que même vous-même, vous pouvez composer pour quelqu’un. Ce vendredi, du côté de l’école primaire de Coléah, un de nos informateurs nous a appelés pour nous dire qu’on vient de vider trois candidates parce que il a été constaté que les informations sont les mêmes sur les trois cartes, alors que le premier jour, tous les trois candidats avaient composé.
Ces irrégularités ont-elles été constatées sur toute l’étendue du territoire ?
Lorsque vous prenez les 33 préfectures de la Guinée, nous avons eu à couvrir au moins une vingtaine. Des anomalies ont été détectées un peu partout. Nous demandons une annulation pure et simple de ces examens.
Propos recueillis par Hawa Bah