Le ministre guinéen des Affaires étrangères s’était déjà chargé de répondre à son homologue français. Ce parce qu’il y a quelques semaines, en audition à l’Assemblée nationale française, Jean-Yves Le Drian avait laissé entendre qu’il ne lui paraissait pas que la volonté de réforme constitutionnelle portée par Alpha Condé soit partagée ni par l’ensemble du peuple de Guinée, ni par ses voisins. Mais le président guinéen n’a pas voulu s’en tenir à la réplique de son ministre. En sorte qu’il a profité de la cérémonie d’inauguration du siège de l’ANIES, ce mercredi pour en rajouter une couche. Et pas qu’à destination de la France.
Plutôt classique de la part des dirigeants guinéens quand ils ont des divergences avec des acteurs de la communauté internationale, la réaction d’Alpha Condé s’ancre dans un souverainisme qui trouve son expression la plus aboutie dans le rejet par la Guinée du référendum gaulliste le 28 septembre 1958. « La Guinée a une tradition d’indépendance et de souveraineté. Nous allons continuer, nous ferons ce que le peuple de Guinée veut. La Guinée a toujours été ainsi. En 1958, malgré tous les risques, on a osé dire non et prendre notre indépendance. Mais nous sommes toujours debout », rappelle vertement Alpha Condé. Qui poursuit :
Nous discutons avec nos partenaires, nous écoutons leurs conseils. Mais personne ne dicte à la Guinée ce qu’elle doit faire. C’est le peuple de Guinée qui décide de son avenir. Que cela soit clair pour tout le monde. Et ça c’est l’histoire de la Guinée depuis 1958, ce n’est pas Alpha Condé. (…) Le partenariat doit reposer sur le respect, nous respectons les autres, ils doivent nous respecter aussi.
Le président de la République citant même nommément la France, dit en substance à celle-ci qu’elle n’a point de leçons à donner à son pays. D’autant que l’ancienne puissance coloniale n’est pas, elle non plus, nécessairement parfaite, à en croire Alpha Condé :
Avec les nouvelles technologies, on voit ce qui se passe dans le monde. Alors pourquoi va-t-on nous obliger à faire différemment ce que les autres font chez eux ? Nous voyons des manifestations et crises partout. La Guinée est un pays de paix. Bien sûr, nous savons ce qu’une certaine presse essaye de présenter de la Guinée …Nous voyons aujourd’hui les dégâts des réseaux sociaux. Il me semble que le gouvernement français cherche à contrer les réseaux sociaux. Mais c’est une illusion, car personne ne peut contrôler les réseaux sociaux. Nous sommes prêts à collaborer avec nos partenaires, à écouter leurs remarques, leurs suggestions, mais dans le respect réciproque. Je le dis et j’insiste là-dessus.
Propos recueillis par Balla Yombouno