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MALI : IBK, un président en sursis

Le Mali vient de vivre un week-end particulièrement agité. Depuis le vendredi 10 juillet en effet, la capitale Bamako en particulier, est en proie à des troubles qui frisent l’insurrection. A la suite de l’appel à la désobéissance civile lancé par le Mouvement du 5 juin (M5), les contestataires du pouvoir d’Ibrahima Boubacar Keïta sont entrés dans une forme de rébellion qui ne dit pas son nom. Prenant en otage deux des trois ponts qui relient les deux rives de la ville séparées par le fleuve Niger, les manifestants s’en sont aussi pris à des bâtiments plutôt symboliques dont la télévision nationale et l’Assemblée nationale. En face, si dans un premier temps, il avait été dit que les forces de l’ordre n’ont pas réagi, on déplore tout de même 11 morts en trois jours. De quoi mettre davantage le président de la République sous pression. Prenant subitement la mesure de la crise, il a annoncé dans la soirée de samedi une dissolution de fait de la Cour constitutionnelle. Son premier ministre, Boubou Cissé, quant à lui, promet la formation d’un gouvernement d’union nationale, dans les meilleurs délais. Mais il n’est pas certain que ces offres suffisent à calmer une fronde qui semble avoir résolument épousé la radicalisation.

IBK et la stratégie de l’usure

Finalement, Ibrahim Boubacar Keïta n’est pas si différent de nombre de ses homologues du continent africain. Comme beaucoup  d’entre eux, en tout cas, il a voulu jouer à l’usure avec la contestation à laquelle il fait face. Se refusant à voir la réalité en face, il a ainsi passé les six dernières semaines à balader Mahmoud Dicko et les siens. Alors que la protestation résulte d’un ensemble de frustrations aux origines multiples et variées, il se sera surtout évertué à ne voir en elle que le fait de politiciens cupides uniquement préoccupés par une banale répartition des postes juteux du pouvoir. Ainsi, sa concession s’était jusqu’ici limitée  au fameux gouvernement d’union nationale. En d’autres termes, il passait sous silence le malaise consécutif à son incapacité à faire face au péril sécuritaire, à la corruption qui gangrène sa gouvernance, à l’inféodation des institutions républicaines dont la Cour constitutionnelle ainsi qu’à l’incapacité de l’Etat malien à fournir à la grande majorité des citoyens les services sociaux les plus basiques. Il espérait qu’en tirant ainsi les choses en longueur, il obtiendrait comme par enchantement l’essoufflement du mouvement. Sauf que ce n’est pas ce qui se produit. Au contraire, c’est cette stratégie empreinte de déni qui a fini par lui péter à la figure ce vendredi 10 juillet. De fait, les Maliens en avaient marre qu’on joue ainsi avec leurs nerfs et qu’on les tourne indéfiniment bourrique. Les violences dont la capitale malienne est le théâtre depuis ce vendredi soir sont donc le reflet de cette exaspération trop longtemps contenue.

La politique de l’autruche et ses conséquences

Malheureusement pour le président malien et tous ceux qui l’auront persuadé d’opter pour cette politique de l’autruche, son attitude ne sera pas sans conséquences. Bien au contraire. La première d’entre elles, c’est bien la radicalisation du mouvement, avec l’émergence des faucons. Outre la désobéissance civile dont déploré déjà les effets tragiques, il y a que la contestation fait marche-arrière par rapport à une concession qu’elle avait déjà faite. Il s’agit de la démission du président IBK qui, avant le vendredi dernier, n’était plus au nombre des points de revendications du M5. Eh bien, désormais c’est le cas. Les tenants de la radicalisation sont par ailleurs renforcés par les 11 victimes de ces trois derniers jours et les nombreux blessés enregistrés par la même occasion. En effet, les réactions disproportionnées des forces de sécurité, dans la gestion des troubles enregistrés durant le week-end ne sont pas de nature à calmer la situation. Loin s’en faut. Il en est de même du choix des autorités d’arrêter quelques-uns des leaders du mouvement. Bref, en trainant les pas durant toutes ces dernières semaines, Ibrahim Boubacar Keïta aura permis à la crise dans son pays d’atteindre le point de non-retour.  Et malheureusement pour lui, lui et son pouvoir risquent d’en payer le prix fort. Car même s’il ne devait pas partir tout de suite, il peut être certain que de son pouvoir, il ne restera plus grand-chose désormais. Dans le meilleur des cas, il ne sera qu’un président en sursis pour les trois dernières années qui lui restent.

Boubacar Sanso BARRY

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