Bagages entreposés ci et là, à l’extérieur de la cour, portes démontées… voici l’état dans lequel s’est retrouvé le foyer SOS Mineurs en prison dans la matinée de ce vendredi 15 janvier 2021. En cause, l’exécution d’un arrêt de la Cour d’appel de Conakry en date du 4 janvier dernier qui attribue ce domaine situé à Sonfonia Soloprimo à l’Archevêché de la ville de Conakry, mettant ainsi 25 enfants à la merci de la nature.
Tout est parti d’un désaccord entre les responsables de ce centre et la Paroisse Charles Louanga, qui s’est progressivement formée dans ses locaux avec la bénédiction de l’archevêché. Mais les deux parties divergent sur les raisons de leur discorde. La première partie évoque des problèmes liés à l’épanouissement des enfants, tandis que la seconde l’accuse de profanation de leur espace de culte. Ce qui a amené l’archevêché à réclamer la paternité du domaine où se trouve le centre.
Avant la création de l’ONG, son coordonnateur Émile Gabriel Gbémémou Sovoeda explique avoir commencé des activités similaires à la maison centrale de Conakry dans les années 90 au nom de l’église, mais nie la propriété du domaine par cette dernière. « C’est nous qui avons acheté le terrain en 2000, en disant à la SONAPI : ‘Nous avons la caution morale de l’église catholique’, parce que n’importe qui ne pouvait pas avoir un terrain à l’époque. Donc, eux, ils se sont servis de ça pour dire que c’est la propriété de l’église. Or, ils ne l’ont pas acheté, ils n’ont pas construit et, nous, on n’a pas vendu. On était en difficulté avec la SONAPI pour le solde du paiement de l’achat. On a écrit à l’archevêché pour dire que nous voulons mettre le domaine sur le patrimoine de l’église pour le protéger, parce que la SONAPI voulait le revendre. Ils ont profité de ça pour aller à la SONAPI et se substituer à nous, donc la SONAPI a effacé toute trace de notre existence », a indiqué M. Gbémémou.
Une version que rejette en bloc le camp adverse qui parle, lui, d’abus de confiance. « A un moment donné, Émile a été menacé par un voisin qui avait beaucoup plus de moyens. Pour récupérer les lieux, comme il ne pouvait plus défendre en son nom, il est parti de son propre gré à l’archevêché pour dire : ‘Si vous ne vous levez pas, on va perdre le terrain de Sonfonia’. C’est en ce moment qu’on a su que les autres documents ont été mis à son nom (….) On lui a dit qu’on ne pouvait pas défendre ce dossier puisqu’il a mis le document en son nom, il faut qu’il rétablisse l’ordre d’abord pour prouver que c’est un bien de l’église. Il a transféré légalement tous les documents à l’église, et c’est ce document que l’église a utilisé pour pouvoir sécuriser le terrain », explique pour sa part Gérard Ansou Bangoura, le directeur de l’Organisation catholique pour la promotion humaine (OCDH).
De toute évidence, des enfants se retrouvent sans abri. Mais cet émissaire de l’archevêché venu s’en quérir de leur situation soutient qu’aucun enfant n’était dans le centre après la décision de la cour. « Il y a toujours eu des enfants ici. On va continuer à se battre. On ne peut pas continuer d’exposer les enfants. On va trouver un logement pour eux, mais il y a des enfants qui n’ont pas fait 4 à 6 mois ici. Ce sera difficile par eux de se réadapter », estime Émile qui est enseignant.
Hawa Bah