C’est une réaction qui en dit long sur la perception qu’il a lui-même de son statut de chef de file de l’opposition. Mamadou Sylla, leader de l’UDG, était littéralement aux anges à la sortie de l’audience que le président Alpha Condé a accordée à son cabinet ce mardi 2 mars 2021. Comme un gamin tout joyeux d’avoir reçu une barre de chocolat, il avait manifestement vu dans cette audience l’étape ultime qu’il fallait pour que son statut soit enfin reconnu. Et la rencontre ayant eu lieu, il a estimé avoir récolté le graal. Et visiblement reconnaissant au président Alpha Condé de lui avoir fait le grand privilège de le recevoir, Mamadou Sylla pense même que l’opposition ne devrait plus se mêler de la question des détenus politiques. Le gouvernement ayant invoqué des raisons sécuritaires pour justifier leur arrestation et leur incarcération, cela n’est plus du ressort du chef de file de l’opposition, pense Mamadou Sylla.
Pourtant, à la rencontre du président Alpha Condé, Mamadou Sylla et ceux qui l’accompagnaient étaient munis d’un mémorandum. « Dans le mémo qu’on a remis au président, il y a tout presque », déclare à propos l’intéressé à la sortie de l’audience. Mais le point sur lequel s’est particulièrement exprimé le leader de l’UDG, c’est le sens de la rencontre pour le chef de file de l’opposition qu’il est. Faisant constater que c’est la première fois que le chef de l’Etat le reçoit, Mamadou Sylla en tire une occlusion empreinte d’un triomphalisme totalement assumé. En effet, selon lui, l’audience de ce mardi avec le président Alpha Condé « veut dire que l’histoire de chef de file de l’opposition est close. Personne d’autre ne peut dire quelque chose aujourd’hui, ne peut me contester Le commandant en chef nous a reçus, et la présidence est la première institution de la République ».
Particulièrement marqué par le « cadeau » dont il a été visiblement gratifié par le chef de l’Etat, Mamadou Sylla pense même qu’il ne peut plus se mêler de l’histoire des détenus politiques. « Quand le gouvernement qui est en charge de sécuriser la population, à sa tête le président (de la République, ndlr) lui-même parle de la sécurité intérieure de l’Etat, nous, malgré qu’on est de l’opposition, on ne peut plus se mêler », dit-il en effet à ce sujet. Il ajoute même: « on ne peut pas décider à la place du président«
De fait, la conception que Mamadou Sylla se fait de son rôle est celle qui s’apparente davantage au partenaire du président Alpha Condé que de son opposant. C’est ainsi qu’il a été très réceptif à la doléance du président Alpha Condé à son endroit. « Il nous a dit que désormais on va travailler ensemble et que sa porte est grandement ouverte pour nous. Chose qui nous a beaucoup rassurés », rend-il compte à propos. Conséquence, Mamadou Sylla ne rechigne à servir de porte-parole au président Alpha Condé pour expliquer aux populations « ce qui se passe dans le pays« .
Finalement, celui qui a exigé de Mamadou Sylla qu’il fasse une déclaration d’appartenance à l’opposition n’a pas nécessairement tort. Parce que là, les choses sont loin d’être claires.
Boubacar Sanso BARRY