Le beurre de karité est une matière très consommée dans la cuisine traditionnelle et utilisée dans l’industrie du chocolat comme substitut au beurre de cacao et comme crème pour cheveux. Mais les femmes qui transforment cette denrée convoitée, dans le district de Madina Koura relevant de la sous préfecture de Bathè Nafadji, situé à 35 kilomètre de la commune urbaine de Kankan, rencontrent d’énormes difficultés dans le travail. C’est le constat fait sur place par le correspondant du Djely en Haute-Guinée, en marge du mois de la femme.
L’acheminement vers la commune urbaine, le manque de matériels de travail adéquats et surtout le manque d’assistance financier de la part de l’État et des partenaires au développement sont entre autres les problèmes auxquels ces braves dames restent confrontées dans cette localité où la population est essentiellement agro-pastorale.
Accompagné de sa petite-fille qui pile les noix de karité en vue des travaux préliminaires, Kany Diallo qui frise la soixante dizaine pratique la transformation du beurre de karité depuis 50 ans, non sans souffrance. “Il y a beaucoup de souffrance dans ce travail. Nous allons jusqu’en brousse pour ramasser les graines de karité et les envoyer à la maison. Un paresseux ne pourra jamais faire cette activité. Avant on enlevait la peau des grains sur le cailloux, mais maintenant on les envoie à la machine. Mais avant d’arriver à la machine, il y a beaucoup de travail. Nous faisons ce travail par manque d’espoir, car l’argent que nous y gagnons n’est pas beaucoup. C’est pour aider nos maris, puisqu’ils ne peuvent pas faire face seuls aux dépenses de la famille, que nous exerçons cette activité », explique la grand-mère.
Mariam Keita qui a suivi une formation avec une organisation sur la transformation du beurre de karité souligne les difficultés à faire écouler la production et les problèmes logistiques que les femmes de la filière endurent. « Après la transformation, les acheteurs ne se bousculent pas pour s’approvisionner. Nous souffrons beaucoup de ça. Nous sommes obligées de plaider auprès des vendeurs qui sont principalement des femmes aussi pour qu’ils achètent notre beurre. Et quand ils acceptent, c’est avec un prix considérablement revu à la baisse qu’ils achètent notre marchandise. Et puis, nous n’avons pas de bâches, pas de magasins pour stocker nos productions. Nous manquons de beaucoup de choses », fait-elle remarquer.
Et sa voisine M’Ballou Mansaré d’enchainer : « Quand on va pour ramasser les graines de karité, on les transporte sur nos têtes. Nous pouvons faire plusieurs tours entre le village et la brousse. Et quand le gasoil finit dans la machine, on est obligées de dépêcher quelqu’un pour aller s’en approprier à Kankan. Le temps de revenir, ça trouve que beaucoup de femmes attendent pour piler leurs graines de karité ».
Mamadi Kanté est celui qui s’occupe de la pulvérisation des graines de karité à Madina. Selon lui, la machine est en panne ces derniers temps. Ce qui rend compliqué le travail des femmes de la filière. “Les gens qui nous ont aidé à avoir cette machine venaient souvent nous apprendre son fonctionnement. Mais ils ne nous aident pas quand la machine tombe en panne. Pour dire la vérité, la machine a été mal installée. Actuellement, elle a d’énormes difficultés pour pulvériser les graines de karité. Nous souffrons beaucoup de sa panne. C’est moi-même qui me débrouille pour la réparer », assure-t-il.
Pour finir, Mariam Keita lance un appel aux autorités et aux personnes de bonnes volontés. “Ils n’ont qu’à avoir pitié de nous, en nous venir en aide. Nous souffrons beaucoup ! S’ils ne nous aident pas nous ne pourrons pas continuer comme ça. On a besoin surtout à avoir de clients », précise-t-elle.
Michel Yaradouno, Kankan pour Ledjely.com