Décédé le 8 mars dernier à l’âge de 89 ans, le professeur Djibril Tamsir Niane a rejoint sa dernière demeure ce lundi au cimetière de Cameroun, dans la commune de Dixinn à Conakry. Mais avant son inhumation, à travers plusieurs témoignages, un vibrant hommage a été rendu à l’auteur du célèbre ouvrage Soundjata ou l’épopée Mandingue, publié en 1960.
La cérémonie d’hommage a eu lieu au chapiteau du Palais du peuple, à laquelle le président Alpha Condé a pris part ainsi que plusieurs membres du gouvernement dont le Premier ministre, Dr Ibrahima Kassory Fofana, et des personnalités de premier rang comme le président de l’Assemblée nationale, Amadou Damaro Camara, des diplomates accrédités en Guinée, des acteurs du livre et des citoyens.
Dans son témoignage, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a rappelé l’implication du défunt dans la « formation de centaine de jeunes guinéens et sociologues » à la tradition africaine dont il était l’un des spécialistes. « Le professeur Djibril Tamsir Niane est un brillant chercheur en histoire africaine qui a su se hisser sans conteste au niveau des professeurs émérites des meilleures universités de son temps. Il nous quitte pour toujours, mais laisse des générations d’intellectuels qu’il a contribuées à former en Guinée et d’ailleurs dans le monde. Il nous laisse une riche bibliothèque pleine de patrimoine accumulé au cours de toute une carrière d’un enseignant-chercheur le plus actif. Il nous laisse un riche héritage », a rappelé Aboubacar Sylla.
A la tête d’une délégation de 28 membres en provenance du Sénégal, où il est décédé la semaine dernière, Hamadi Bokoum, le directeur du Musée national et de civilisation noire a souligné que le défunt « n’était pas un homme comme les autres ; tant par sa trajectoire que par la portée universelle de son message », promettant que le Sénégal s’engage à tout faire pour que l’œuvre du « professeur » soit mieux connue et vulgarisée. « Pour l’Afrique, le Pr Djibril Tamsir Niane a été une incroyable richesse et tradition de parcours historique, notamment du mandingue. De ce geste, il a fait émerger une substance (…) Il a profondément participé à la reconnaissance et à l’affirmation contemporaine de l’histoire du mandingue », a souligné Hamadi Bokoum.
Georges Alfred Kizerbo, au nom du Burkina Faso, a fait des bénédictions à l’endroit de celui qu’il a, avec affection, appelé « papa ». « Cher papa, que l’œuvre que vous avez offerte à l’universel soit payée en multitude de suivants, de disciplines et de servants qui contribuent sous vous traces. Cher papa, vous avez incarné le passeur d’idéaux, d’identité et de savoir. Votre retour à Dieu nous laisse affligés et désemparés, mais votre exemple d’humanisme, de rectitude et d’excellence, nous inspirera de génération en génération », a-t-il assuré.
Le vice-président de l’Association des écrivains de Guinée (AEG) a, de son côté, demandé à tout un chacun d’agir « pour rendre éternelle la mémoire du Pr Djibril Tamsir Niane. En tout cas, l’Association des écrivains de Guinée ira dans ce sens », a promis Dr Alhassane Cherif.
Au nom des petits-fils du défunt, son homonyme Tamsir Niane, lui a rendu hommage en ces termes : » Papa Niane était un grand-père entier dans toutes son humanité et son universalité. Il nous a transmis le poids de l’authenticité et la chaleur réconfortante de l’amour et de la fraternité (…) Ce départ nous emplit d’une certaine nostalgie. Encore un hommage papa Niane, le premier après ton départ mais certainement pas le dernier. Nous prions, nous prierons, nous honorerons ta mémoire et transmettrons ton héritage ».
Les enfants du défunt : Raliatou Fifi Tamsir Niane, Bachir Tamsir Niane et Daouda Tamsir Niane ont, à leur tour, remercié les organisateurs de ce symposium honorifique à la mémoire de leur père.
Pour le Premier ministre, le Pr. Djibril Tamsir Niane a été un homme de toutes les époques, en transmettant le savoir à tant de générations d’ici et d’ailleurs. « Par son engagement panafricain et l’importance fondamentale qu’il a accordée à l’oral dans la production de ses œuvres, il a contribué de manière exceptionnelle et indélébile à valoriser l’histoire de l’Afrique et l’identité africaine. Sa vie durant, Djibril Tamsir Niane s’est consacré à réhabiliter la mémoire africaine, à retrouver les paroles et les épopées perdues dans le tréfonds de nos tiroirs, à exhumer les vestiges, d’objets élitistes de notre patrimoine piégé par le temps et le sable de l’oubli (…) Son chef d’œuvre ‘Soudiata ou l’épopée du mandingue’, publié en 1960, a marqué une forme de révolution dans la restitution de l’histoire africaine avec une valeur singulière accordée aux récits oraux transmis de génération en génération », a rappelé Kassory Fofana.
Et de promettre : « Le gouvernement guinéen veillera, aux côtés du secteur de la culture et de l’université, à ce que l’immense héritage qu’il nous a légué trouve une place de choix dans nos écoles et dans nos universités, à la disposition des générations actuelles et futures ».
Balla Yombouno