La ville de Kouroussa a vécu en samedi 17 avril une journée particulièrement agitée. Des manifestants, ivres de colère et se rendant maîtres de la ville s’en sont pris aux symboles de l’Etat. Ils ont ainsi mis à sac la résidence du maire, fait fuir le préfet et érigé des barrages à travers toute la ville, empêchant de fait toute sortie et toute entrée. Dans l’après-midi, le correspondant du Djely a pu s’entretenir avec le maire dont le domicile n’a pas non plus été épargné. Mamady 1 Condé explique les circonstances dans lesquelles il a dû se mettre à l’abri, mais il établit aussi un bilan qui en dit long sur la furie avec laquelle les assaillants ont sévi. Plus tard dans la soirée, avec l’arrivée de renforts venus de Kankan, on a déploré deux morts parmi les manifestants.
Le maire avec lequel s’est entretenu notre correspondant était très abattu. Il incarnait tout à la fois l’amertume et l’impuissance. Il devrait néanmoins s’estimer heureux. En effet, s’il n’avait pris au sérieux les alertes reçues le matin, il aurait probablement pu y laisser la vie. « Ce matin, je me préparais à aller à la radio rurale où j’avais un rendez-vous avec un ami quand j’ai reçu un appel m’invitant à quitter immédiatement la maison », relate-t-il. Celui qui l’a appelé dont il n’a pas donné le nom lui a dit en effet que les jeunes qui avaient de nouveau érigé des barrages à travers toute la ville menaçaient d’aller s’en prendre au domicile du préfet. Pourtant, la première réaction de Mamady 1 Condé fut de résister. Estimant qu’il n’a pas à se défiler face aux revendications des populations, il se proposait d’attendre sagement que les gens viennent le trouver sur place. Mais des jeunes frères à lui qui suivaient les manifestations à travers la ville ont fini par le convaincre de la nécessité de se mettre à l’abri. « Avec l’allure que prenaient les manifestations et vu mon état de santé (hypertendu), mes jeunes frères sont venus me chercher et m’ont envoyé chez un ami au quartier Komoniko et c’est là-bas que je suis resté pendant que tous ces dégâts se commettaient », explique-t-il.

Justement, évoquant ensuite les dégâts, l’ancien journaliste de la radio rurale de Kouroussa établit un bilan : « Vous voyez vous-même, mon domicile, c’est comme un champ. Ce sont les femmes qui sont venues les premières. Ce groupe n’a rien fait de grave presque. Mais c’est le second groupe qui a fait ce à quoi je ne m’attendais pas. Il y a notamment eu des jets de pierres et ils ont détruit mes tôles. Mon véhicule n’a pas été épargné, les différentes chambres ont été touchées, la perte est grande ».
Aux dernières nouvelles, nous apprenons qu’on déplore deux morts parmi les manifestants. Un bilan qu’une source contactée sur place impute aux bérets rouges arrivés en renforts dans l’après-midi. « Depuis que les militaires sont arrivés, ils tiraient partout et c’est en fuyant les hommes en tenue que la première victime a reçu une balle perdue alors qu’il était sur un toit dans l’enceinte de la commune urbaine. La seconde victime est un citoyen du village de Menindji situé à 5 kilomètres de la ville, il a aussi reçu une balle , j’ai été personnellement les voir au niveau de la morgue de l’hôpital préfectoral de Kouroussa où ils y trouvent », rapporte le responsable communal de la jeunesse.
Michel Yaradouno