De loin on peut apercevoir une immense fumée jaillir d’un hangar, dans lequel sont assises plusieurs femmes dont formant des petits groupes. Sur des plastiques étalés par terre, elles fendent des poissons qui devront être fumés dans quelques minutes et juste en face d’elles, sont disposés des fourneaux sur lesquels sont exposés des poissons qui fument au feu doux. Nous sommes dans un mini centre de fumage de produits halieutiques situé au quartier Nongo dans la commune de Ratoma.
Dans ce centre, on fume généralement le mâchoiron communément appelé konkoé qui est l’un des poissons le plus consommés en Guinée. M’mah Sylla, mère de 9 enfants a hérité ce métier de ses parents. La dame de la cinquantaine, vêtue d’un t-shirt noir, d’un pagne et d’un foulard qui ne couvre pas tous ses cheveux. C’est son style vestimentaire quand elle s’apprête à exercer son métier, nous a-t-elle dit en off. Sous le hangar, M’mah est dans la fumée au quotidien, elle essuyait des petites goutes de larmes qui coulaient de ses yeux rouges. Dame Sylla habite aussi à Nongo. Quotidiennement, elle se lève à 5 heures du matin pour se rendre à Kénien marché pour se procurer de poissons. « Il faut être très matinale pour avoir de la bonne marchandise. Parce-que là-bas, ce sont les premiers sur les lieux qui sont mieux servis ».
A 8 heures, elle est au centre de fumage et le travail commence. A notre micro, elle explique comment se fait le fumage de poisson. « Pour commencer, j’éventre le poisson et le vide de son contenu indésirable. Je le lave bien très bien et puis le pose sur le fourneau. Ensuite je mets des bois morts sous le fourneau et c’est avec le feu projeté par ces bois que je procède lentement au fumage. Chaque 10 minutes je retourne le poisson jusqu’à ce qu’il prenne la couleur marron. Après j’enlève pour les mettre sur un plateau. Et, c’est après tout ce travail que mes enfants sortent sur le terrain pour écouler notre marchandise ».
Pour compenser les pertes, elle est contrainte de s’activer sur le séchage d’un petit organe se trouvant dans le ventre du poisson qui est souvent acheté par les étrangers. « Il y’a un petit organe dans le ventre du mâchoiron qui est très sollicité par les chinois. S’il m’arrive d’avoir des soucis financiers, c’est cet organe que je sèche au soleil et puis je le revends. » Une affaire qui a été ralentie par la pandémie de la COVID « avant le coronavirus, la vente de cet organe marchait très bien. Car on revendait le kilogramme à cent mille francs guinéens », a-t-elle ajouté.
Abdoul Karim Camara est un de leurs fidèles clients, il s’approvisionne chaque fois en poisson à cet endroit. « Je viens acheter du konkoé ici pour son originalité. Parce-que dans les marchés, il y a des personnes qui revendent du poisson ayant la même forme que le konkoé mais qui ne l’est pas. Donc si tu ne sais pas faire la différence, elles vont te berner ».
M’mah Sylla demande aux autorités de les aider à avoir un centre de fumage digne de nom « mais aussi nous assister financièrement. Cet espace que nous occupons, nous été prêté par un monsieur et il peut le réclamer à tout moment. Si l’État ne nous aide pas, ça sera dommage pour nous».
Tout comme M’mah Sylla, elles sont nombreuses ces femmes qui avec l’assistance de leurs enfants travaillent 7 jour sur 7 pour subvenir aux besoins de leurs famille.
Mariama Ciré Diallo