Le Djembé est un tambour africain qui possède une forme emblématique. Il est à la fois un instrument à percussion et une œuvre d’art en soi. Sa description physique révèle à quel point il est unique et fascinant. Originaire d’Afrique de l’Ouest, le djembé a la forme identique à celle du mortier, taillé à la main dans une seule pièce de bois, dont la tonalité est la résultante d’un jargon connu et compris que par des initiés. C’est un instrument en bois ayant une forme d’un calice sur lequel une peau est tendue par-dessus afin qu’elle soit frappée avec les mains. Ceux qui pratiquent cet instrument de musique sont appelés dans la communauté mandingue les « Djembéfola », « percussionniste ».
Autrefois un métier de caste, le « Djembéfola » connaît aujourd’hui une forte influence à travers le monde. Patrimoine culturel africain, les « Djembéfola » sont confrontés aux défis de la modernité et auxquels ils se heurtent au quotidien.
Aussi, la pratique du djembé est perçue par une frange de guinéens comme un sot métier. Alors qu’il a été à l’origine de la réussite de bon nombre de ses adeptes résidant à l’étranger. « Les gens disent que c’est un travail délinquant, un travail pour les vagabonds. Sauf que depuis plusieurs années maintenant, nos collègues qui résident à l’extérieur vivent de ce métier dans ces pays et investissent ici aussi en Guinée », confie Sékou Camara, maître percussionniste.
Ils jouent le sourire aux lèvres, emportés par le rythme des tam-tams sous l’écoute vigilante de leur maître. Pour Sékou Sylla, cette attitude explique leur enthousiasme vis-à-vis du métier : « lorsqu’on exerce un métier par passion, surtout le nôtre, le sourire vient naturellement. Cela exprime la joie intérieure que nous ressentons une fois derrière nos djembés. Moi quand je joue, sincèrement, j’ai l’impression d’être dans le paradis », dit ce Djembéfola. « Tout comme les gens échangent entre eux, le djembé parle aussi aux gens. Tu peux appeler quelqu’un avec le djembé, faire l’éloge de la personne et j’en passe. Mais ce n’est pas tout le monde qui comprend, seulement les danseurs, les danseuses et les initiés à cet instrument », renchérit le maître percussionniste.
De l’Argentine en Guinée, Lissa une passionnée du Djembé explique sa motivation et son amour pour cet art : « Je me suis dit de suivre l’héritage familial parce que ma grand-mère vient de l’Afrique, du Ghana précisément, donc pour moi, c’est un énorme plaisir de venir en Guinée ici pour aussi marquer l’histoire ». Mais pourquoi la Guinée et pas le Ghana, a-t-on demandé à Lissa. Sa réponse en dit longue sur sa motivation. « C’est à cause de ma maîtresse Manfila Kouyaté, on a fait connaissance en Argentine où elle habitait à l’époque. Lorsque je lui ai vue danser, elle dégageait quelque chose d’unique et jusque-là, je n’ai pas vu en d’autres personnes ce que j’ai vu en elle. Donc c’est comme ça, nous avons travaillé ensemble pendant 10 ans », précise Lissa Lasso.
Un brassage culturel qui menace par endroit l’avenir du métier : « entre les murs des continents Européen et Américain, nos guinéens commencent à perdre les classes parce que la majeure partie des blancs a appris bien le djembé et très bien la danse. Aujourd’hui c’est leur couleur et c’est eux-mêmes qui enseignent cette discipline dans les universités étrangères », souligne Sékou Camara. « À l’heure actuelle, quand un étranger joue le djembé devant toi, tu vas dire que c’est un africain qui joue », ajoute-t-il.
Aujourd’hui, l’instrument se modernise, la pratique s’étiole. Toutefois, nombreux de ses mordus restent pessimistes quant à l’avenir des Djembéfola en Guinée. Et d’autres se disent être déterminés à porter haut ce patrimoine malgré les obstacles.
JTI de l’ombre
