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PROPOS DE MOHAMED BEAVOGUI : Joachim Baba Millimono lui adresse une lettre

Monsieur le Premier Ministre,

En tant que Guinéen et militant de l’UFDG, c’est avec tristesse et consternation que j’ai suivi votre discours de Nzérékoré devant un parterre de jeune.

Monsieur le premier ministre, vu votre expérience professionnelle internationale et votre aptitude à distinguer un Etat totalitaire d’une société démocratique, je m’attendais à mieux de votre part. Je m’attendais à ce que vous agissiez conformément à votre mission de premier ministre de la transition. Œuvrer pour la paix et la cohésion nationale comme vous l’a demandé le président de la transition.

Les propos tenus à cette occasion ne sont pas de nature à rassembler la Nation et à favoriser la paix en ces temps de pouvoir exceptionnel où chaque institution, chaque organisation et chaque individu se doit d’agir avec prudence et retenue. Vous auriez dû épargner le pays de propos aussi clivants que tendancieux, susceptibles d’accroitre la méfiance et la défiance entre les populations de notre pays.

Monsieur le premier ministre, vous avez fait le constat « de jeunes tués, blessés et brûlés) (au cours de la gouvernance Alpha), heureusement que vous n’étiez pas en Guinée, même si vous précisez que vous reveniez au pays au moins trois fois par an.

Si vous aviez été là, dans les manifestations de l’opposition où dans les quartiers à fortes concentrations de répression, peut-être que vous auriez tenu un discours plus rassembleur, un discours plus nuancé. Dans un élan euphorique, voire de passion, porté par l’assurance du pouvoir, vous avez lancé aux jeunes « Ne mourrez pas pour quelqu’un, mourrez pour vous-même, vous-mêmes c’est votre avenir, le colonel est là pour vous…. » Monsieur le premier ministre, si vous avez choisi de faire de la politique pour le CNRD et son président, vous n’avez pas le droit de travestir la vérité sur l’histoire politique contemporaine de notre pays. En fait, à peu de choses près, vous tenez le même discours qu’Alpha Condé pour justifier les répressions sanglantes de son régime contre ceux qui s’opposaient à sa politique illégale et injuste.

Non Monsieur le premier ministre, aucun manifestant ne meurt pour un politicien, tous ceux de nos compatriotes qui ont été tués dans les manifestations ou en dehors de celles-ci sont morts pour leur dignité, en défendant leurs convictions profondes, pour la Guinée, jamais pour un politicien. Jamais pour Cellou Dalein et l’UFDG que vous semblez viser sans les nommer puisque, pour être honnête, l’opposition à Alpha Condé était essentiellement incarnée par l’UFDG.

Les victimes de la répression du régime Alpha Condé n’étaient pas tous des manifestants, certains jeunes ont été fauchés à leurs domiciles, d’autres sur le chemin de l’école ou encore en se rendant chez le boutiquier du coin pour acheter du pain. Que dire de l’assassinat, à Womé, de trois journalistes employés de deux radios de N’zérékoré, cette localité même où vous avez tenu ce discours avilissant, alors qu’ils étaient dans l’exercice de leurs fonctions. Ou dois-je vous rappeler aussi les destructions à N’Zérékoré, d’édifices religieux (cinq Églises, 2 mosquées) et de nombreuses maisons de particuliers incendiées, en mars 2020, ou encore la soixantaine de morts recensés dont la majorité a été inhumainement enterrées dans une fosse commune privant les familles endeuillées de se recueillir des dépouilles mortelles. Vous semblez ignorer cela tout comme vous feignez d’ignorer qu’en République de Guinée aussi manifester est un droit et tuer reste un crime.

L’UFDG, le FNDC et beaucoup d’autres partis politiques et mouvements de la société civile ont résisté à l’obscurantisme politique d’Alpha Condé. Je n’hésite pas à dire que le coup d’état du 5 septembre et votre nomination comme premier ministre résultent du sacrifice douloureux de nombreux de nos compatriotes, jeunes et moins jeunes. De grâce, si vous ne les commémorez pas, n’insultez pas leurs mémoires pour les besoins d’un pouvoir précaire et éphémère.

Monsieur le premier ministre, notre pays a besoin de paix, de réconciliation et de cohésion nationale, il a surtout besoin d’hommes et de femmes capables de transcender les contingences politiques pour privilégier l’intérêt national et la réussite de la transition pour tous les Guinéens.

Alors, j’ai envie de vous dire de revoir votre discours, de ne pas travestir l’histoire récente de la Guinée et de ne pas continuer à servir de vecteur pour la division et la stigmatisation populiste dans notre pays.

Joachim Baba Millimouno, Politologue
Coordinateur de la cellule de communication de l’UFDG

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