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Minusma, Monusco… : un vrai débat et de fausses solutions

Pour la mission des Nations unies au Mali (Minusma), le compte à rebours est lancé. Les quelques 13 000 soldats de la paix sont censés avoir quitté le Mali au plus tard le 31 décembre prochain. Telle est la conséquence de la résolution adoptée le vendredi dernier par le Conseil de sécurité des Nations unies. Et bien sûr, ce choix des autorités de la Transition malienne, comme tous ceux qu’elles opérés ces derniers mois, donne lieu à toutes sortes de commentaires. Globalement, deux camps émergent. Celui qui, s’alignant derrière le colonel Goïta et ses camarades, plébiscite le départ annoncé des casques bleus, au motif qu’ils ne faisaient pas le job pour lequel ils ont été déployés. En face, on a ceux qui y voient une nouvelle manifestation d’un populisme enveloppé dans un souverainisme que les dirigeants maliens ont érigé en programme de gouvernance. Mais en réalité, le problème est plus complexe que cette logique binaire. Au-delà du cas malien, la problématique se rapportant aux missions de maintien de paix des Nations unies en Afrique donne lieu à un vrai débat. Parce qu’il est vrai que leur efficacité n’est pas toujours établie. Il en découle que leur pertinence doit légitimement être interrogée. Mais le fait d’appeler tout de go et de manière quelque peu spectaculaire à leur retrait, ce n’est pas ça la solution. Surtout si c’est pour les remplacer par des mercenaires aux agissements imprévisibles.

En RD Congo, on tue et viole, malgré les 18 000 casques bleus

Le rejet de la Minusma au Mali et de la Monusco en RD Congo est illustratif de la problématique à laquelle les missions onusiennes donnent lieu en Afrique. Mobilisant des ressources logistiques, humaines et financières importantes, elles n’enrayent cependant pas la spirale de la violence qui prévaut respectivement dans l’un et l’autre des pays. Ce, depuis une décennie au Mali et depuis plus longtemps encore en République démocratique du Congo. Dans le premier, la présence des casques bleus n’a jamais empêché les terroristes islamistes de perpétrer leurs sales attentats. Au contraire, malgré cette présence, les 2/3 du territoire malien échappe de fait au contrôle de l’Etat malien. Dans le second, les 18 000 membres de la Monusco coexistent depuis vingt-quatre ans avec les groupes armés qui tuent, violent et soumettent les populations civiles dans l’est de la RD Congo. Dix-huit milles militaires et policiers qui n’auront pas dissuadé les groupes armés soutenus par le Rwanda ou l’Ouganda de faire des incursions meurtrières répétées en territoire congolais et qui n’auront pas su empêcher l’exploitation illégale des ressources minières dans cette région orientale du Congo.

Mandat rigide

Ce paradoxe, les populations au nom desquelles ces missions sont déployées, l’ont toujours pointé. Mais à chaque fois, on leur a réservé la même réponse : ce sont des missions de maintien de la paix et non des missions d’instauration de la paix. En d’autres termes, elles ne sont pas censées s’impliquer dans les combats. Elles n’en ont pas le mandat, prétend-on souvent, avec une banalisation révoltante. Et ce mandat, personne ne semble vouloir le faire évoluer pour l’adapter aux réalités qui prévalent sur le terrain. Au nom d’un ‘’mandat’’ décidément rigide, les casques bleus sont donc autorisés à assister sans broncher aux massacres de femmes et enfants innocents ? Même quand, dans le cas par exemple de la RD Congo, certains groupes rebelles érigent le viol en arme de guerre, la mission onusienne ne peut pas bouger le moindre doigt. Finalement, à quoi servent ces missions ? En quoi seraient-elles alors nécessaires ? Ne serait-il pas plus juste de les considérer davantage comme des voyages touristiques de longue durée ? Ces questions demeurent dès lors légitimes. Et il n’y a pas que le Mali et la République démocratique du Congo (RDC) qui devraient se les poser.

Souverainisme et protectorat

Justement, il n’y a pas que les pays directement concernés qui devraient se pencher sur cette problématique. Et mêmes ces derniers ne devraient pas envisager le débat de leur seul point de vue. En premier lieu, les Nations unies elles-mêmes devraient écouter d’une oreille attentive les critiques auxquelles ces missions font face depuis des années. Il est en effet indéniable que ces critiques renvoient à des défis que l’ONU ne devrait pas ignorer. Or, jusqu’ici, plutôt enfermée dans une conception dogmatique du mandat des missions de maintien de paix, l’organisation a préféré ne pas voir la réalité en face, faire comme si de rien n’était. Une attitude que les pays africains ont sans doute assimilée à un mépris et à de la condescendance. Ensuite, l’Union africaine et les organisations régionales devraient, plus que n’importe qui d’autre, se saisir de la question de la sécurité du continent. Plus de 60 ans après les indépendances, ce n’est pas raisonnable que l’Afrique fasse toujours appel à d’autres pour assurer sa sécurité. Car la sécurité, c’est quelque chose de hautement sensible et stratégique à la fois. C’est du domaine régalien de nos Etats. En effet, comment espère-t-on rivaliser et rattraper ceux auxquels nous faisons encore appel pour nous aider à garantir l’intégrité de nos territoires respectifs ? A-t-on seulement une idée des informations et des renseignements ‘’stratégiques’’ que nos prétendus partenaires amassent dans le sillage de leur déploiement dans nos territoires ? L’Afrique et ses leaders doivent être plus ambitieux et plus cohérents. En tout cas, en 2023, on ne peut pas se prétendre souverainiste et compter sur la France, les Etats-Unis ou la Russie pour assurer la défense de son pays et la sécurité de ses compatriotes. Parce qu’à priori, souverainisme et protectorat ne font pas bon ménage.

Boubacar Sanso Barry

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