Des jeunes de la commune de Matam ont manifesté ce mardi 8 avril 2025 devant les services d’urgence de l’hôpital Donka. Ils dénoncent le refus supposé des médecins de prendre en charge deux de leurs amis blessés, faute de moyens financiers, ce qui aurait conduit à leur décès.
Selon les témoignages des proches et amis des victimes, ils étaient trois — deux garçons et une fille — circulant à moto lorsqu’ils ont été victimes d’un accident de la route vers 5 heures du matin, au niveau du marché de Madina, dans la commune de Matam. Le groupe revenait d’une boîte de nuit.
Dans un état critique, les trois blessés ont été conduits aux urgences de l’hôpital Donka.
« Nous les avons amenés aux urgences où des médecins de garde étaient présents. Nous leur avons demandé d’intervenir immédiatement. Mais malheureusement, seule la fille a été prise en charge, parce que ses parents étaient sur place et ont payé les frais médicaux. Les deux garçons n’ont pas été pris en charge car leurs parents n’étaient pas là pour garantir le paiement. Ils ont emmené la fille au bloc opératoire, abandonnant les deux garçons, qui sont décédés une heure plus tard. Nous sommes venus réclamer leurs corps et exiger justice », témoigne Alseny Hawa Camara, un proche des victimes.
Du côté de l’hôpital, le chef des urgences conteste catégoriquement ces accusations et parle plutôt d’un « dépôt de corps ».
« Effectivement, trois personnes nous ont été amenées vers 5 heures du matin. Elles circulaient à moto — deux hommes et une femme au milieu — lorsqu’elles ont percuté un camion en stationnement, provoquant de graves blessures. À leur arrivée, notre équipe médicale est immédiatement intervenue. Après évaluation dans le véhicule, il a été constaté que deux victimes étaient déjà décédées. Seule la femme était encore en vie. Ce constat a d’ailleurs été confirmé par un des accompagnants, qui semblait avoir des notions de premiers secours », explique le Dr Amadou Camara, responsable des urgences.
Il poursuit : « L’équipe s’est donc concentrée sur la prise en charge de la seule survivante. Je pense que les accompagnants n’ont pas compris qu’il fallait gérer l’urgence vitale en priorité, avant de s’occuper des formalités liées aux décès. Aucun parent n’avait été identifié au moment de l’arrivée. À ce jour encore, nous ne connaissons pas les proches de la survivante, qui dit s’appeler Bérété et venir de Boussoura ».
Le Dr Camara insiste : « Les rumeurs selon lesquelles seuls les patients dont les familles paient sont pris en charge sont fausses. La victime qui a survécu n’a toujours pas été identifiée par ses proches, et aucun paiement n’a été effectué. À Donka, nous suivons une procédure stricte : les cas les plus urgents sont traités immédiatement. Les deux jeunes étaient malheureusement déjà morts à leur arrivée ».
Il déplore ensuite le comportement des manifestants. « Une fois le décès constaté, nous avons entamé les démarches pour transférer les corps à la morgue. Mais les proches ont refusé, ont semé le désordre, saccagé les locaux, agressé certains membres du personnel, dont l’infirmière en chef, qui a été frappée et à qui on a cassé le téléphone. Ce type de violence n’a pas sa place dans un établissement de santé », déplore-t-il.
De son côté, Lancinet Diakité, chef de quartier de Madina Centre, a appelé au calme et à la retenue.
Au moment où nous quittions les lieux, les corps des deux jeunes avaient été transférés à la morgue, en attente d’inhumation.
Balla Yombouno