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François Lounceny Fall : « Les leaders de la CEDEAO ont l’impérieuse obligation de sauvegarder cet acquis »

De ce 29 janvier 2025, les Africains en général et ceux de l’espace ouest-africain en particulier devraient longtemps se souvenir comme d’un jour sombre. Qu’on soit tenant de la position de la CEDEAO ou de celle de l’AES, on doit normalement être meurtri par la séparation qui devient effective, ce mercredi. A partir d’aujourd’hui, le bloc régional, jadis un modèle d’intégration prometteur, passe de 15 à 12 pays. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger n’en faisant plus partie en effet. Alors qu’à l’autre bout du continent, la RD Congo et le Rwanda s’enrichirent par rebellions interposées et qu’un peu plus au nord, le Soudan est plus que jamais menacé par l’affrontement entre les partisans des généraux al-Burhan et Hemetti, cette fragmentation de la CEDEAO, trahison ultime des pères fondateurs, en rajoute aux raisons de désespérer de ce continent. Heureusement, l’ancien premier ministre et Ancien Représentant spécial des Nations unies en Somalie, en République Centrafricaine puis pour la Région de l’Afrique centrale, aide à tempérer notre abattement, en puisant dans son optimisme qu’il hérite sans doute de sa gestion de nombreux foyers de tension. Dans cet entretien exclusif accordé à notre rédaction, s’il ne méconnait pas en effet les erreurs imputables à l’organisation régionale, de même qu’il n’ignore pas non plus un contexte plutôt favorable aux incompréhensions, François Lounceny Fall préfère néanmoins espérer que les initiatives portées à la fois par le Sénégal, le Ghana et le Togo vont finir par combler le fossé et ainsi préserver l’idéal de l’unité des peuples d’Afrique.  

Lisez plutôt…

Que diriez-vous de cette journée qui marque le départ des trois pays de l’AES du bloc de la CEDEAO ?

Je ressens une grande tristesse de voir s’effriter une organisation qui a porté tant d’espoirs pour l’intégration de nos peuples. Une organisation qui était considérée et enviée de tous comme le bon modèle de l’intégration en Afrique.

Quel enseignement la CEDEAO doit-elle tirer de cette séparation ?

Il faut avoir le courage de le dire. La CEDEAO a mal géré les situations créées dans les trois Etats.

Dans le passé et j’en parle en connaissance de cause, puisqu’en tant que membre du Comité ministériel de Médiation de la CEDEAO, nous avons réussi dans le passé à bien gérer des coups d’Etat dans la sous-région et à organiser le retour à un ordre constitutionnel normal sans en venir à des sanctions globales et à l’usage de la force.

Les sanctions globales affectent beaucoup plus les pauvres populations que les auteurs de coups d’Etat. De même, je ne crois pas que l’usage de la force soit le meilleur moyen de restaurer l’ordre constitutionnel. D’ailleurs, la CEDEAO a- t- elle la capacité et les moyens militaires de le faire, en sachant bien que tous les États de la CEDEAO ne sont pas la Gambie.

La CEDEAO doit privilégier les voies diplomatiques qui ont toujours porté des fruits.

 Les soupçons d’interférence extérieure n’ont pas non plus arrangé les choses.

La CEDEAO doit revenir à ses valeurs originelles pour œuvrer à réunir la famille. Je salue l’initiative du Sénégal et du Ghana qui œuvrent pour le retour du Mali, du Burkina et du Niger dans la grande famille de la CEDEAO.

Le Togo dit ne pas exclure, lui aussi, d’intégrer l’AES. Diriez-vous que la désintégration de la CEDEAO est devenue inéluctable ? Sinon, comment peut-elle éviter cette perspective ?

On parle ces derniers temps du désir du Togo de se joindre à l’AES, mais on ne parle pas de son départ de la CEDEAO heureusement. Le Togo, grâce à ses prises de position modérées joue un rôle important au sein de la CEDEAO pour ramener la cohésion en son sein. Il ne saurait en être autrement d’ailleurs quand on sait le rôle majeur joué par le Président Gnasingbé Eyadema dans la création de la CEDEAO.

Certes, d’autres pays membres de la CEDEAO comme le Togo, le Bénin, le Nigeria, la Côte d’Ivoire, voire le Ghana font face à des menaces de groupes terroristes comme les trois États de l’AES.

Plutôt que de lever des armées pour rétablir l’ordre constitutionnel, les Etats membres de la CEDEAO gagneraient grandement à mutualiser leurs forces pour voler au secours des pays frères pour la défense de leur intégrité territoriale.

Au-delà de la crise actuelle, quels sont les grands défis auxquels la CEDEAO doit s’atteler ?

Au stade actuel, les leaders de la CEDEAO ont l’impérieuse obligation de sauvegarder cet acquis de raffermissement des liens entre les peuples.

L’idéal de la CEDEAO patiemment mis en œuvre par les pères fondateurs doit être préservé à tous les prix. Tout doit être mis en œuvre pour ramener les trois Etats frères au sein de la famille.

De même, la CEDEAO doit revenir à son mécanisme de médiation et de règlement pacifique des conflits sans aucune ingérence extérieure.

Propos recueillis par Boubacar Sanso Barry

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