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Invitation de Trump : l’Afrique peut-elle saisir l’opportunité ?

Dans l’absolu, il est positif que Donald Trump ait invité cinq dirigeants africains à un déjeuner de travail. Cette initiative marque, en apparence du moins, une évolution dans la perception du continent africain par le président américain. Celui-là même qui, par le passé, n’hésitait pas à qualifier indistinctement les Etats africains de « pays de merde » semble désormais leur accorder un certain intérêt. Ce revirement n’est sans doute pas étranger à la convoitise croissante que l’Afrique suscite auprès de puissances comme la Chine, la Russie ou encore des acteurs émergents tels que le Qatar et la Turquie. Malheureusement, l’attention que le continent attire reste majoritairement centrée sur ses ressources naturelles, en particulier celles du sous-sol.

De toute évidence, Donald Trump ne semble guère sensible aux discours des nouveaux leaders africains prônant la transformation locale des matières premières, notamment minières. En s’intéressant au manganèse gabonais, au pétrole et gaz sénégalais et mauritanien ou encore aux minerais stratégiques de la RDC, il y a fort à parier qu’il n’envisage ces pays que comme de simples fournisseurs de matières premières destinées à alimenter les industries américaines. L’autre explication possible étant des considérations sécuritaires centrés sur les risques qui planent sur le golfe de Guinée et par les menaces islamistes qui descendent de la zone sahélienne.

Pourtant, lorsqu’il a convié ces cinq chefs d’Etat à sa table, aucun d’eux ne s’est interrogé publiquement sur la portée réelle de cette rencontre. Tous y ont vu une forme de consécration personnelle, un privilège rare : celui de partager un repas avec le dirigeant de la première puissance du monde. Du coup, toutes les résolutions souverainistes et les ambitions de rupture se sont subitement envolées. Ne subsiste que la fierté d’avoir été choisi. L’allégeance à l’égard des Etats-Unis étant curieusement moins tolérée par les temps qui courent que celle vis-à-vis de Paris

Cela illustre bien à quel point les mentalités n’ont pas fondamentalement évolué sur le continent. Depuis les indépendances, le même schéma se reproduit. Quand certains trépignent à l’idée d’être reçus à l’Elysée, d’autres s’empressent, comme des enfants émerveillés, de rejoindre Moscou ou Washington. De l’époque des Kadhafi, Sassou Nguesso, Bongo ou Mobutu à aujourd’hui, peu de choses ont changé dans cette dynamique.

Autre constat d’immobilisme : le statut que les partenaires étrangers réservent à l’Afrique n’a pas évolué non plus. Elle demeure, dans leur esprit, une simple pourvoyeuse de matières premières. Certes, Donald Trump se démarque en proposant des relations commerciales et des investissements, là où d’autres avaient l’habitude de brandir une aide internationale souvent empreinte de condescendance et de paternalisme. Mais au fond, cela change-t-il vraiment la donne ?

Car en dehors de ses ressources naturelles, que peut offrir aujourd’hui l’Afrique sur la scène mondiale ? Ni produits agricoles compétitifs, ni innovations technologiques, ni main-d’œuvre hautement qualifiée. En cela, Trump a peut-être le mérite d’être plus franc, en ne s’encombrant pas de faux-semblants humanitaires. Mais pour les pays africains, le résultat risque bien d’être le même : une relation déséquilibrée, dictée par les besoins des autres.

Tant que l’Afrique ne tirera pas les leçons de ses relations passées avec le reste du monde, elle continuera d’être perçue et traitée comme une réserve à ciel ouvert. Il revient à ses dirigeants de changer ce narratif, non par les mots, mais par des actes concrets.

En somme, ce regain d’intérêt de Donald Trump pour l’Afrique risque de faire deux victimes : l’Europe et l’Afrique elle-même. La première, désormais l’ombre d’elle-même et incapable de suivre la rude compétition entre les Etats-Unis et la Chine, se retrouve à la traîne. Quant à la seconde, elle continue de payer le prix de mauvais choix de dirigeants. Lorsqu’il ne s’agit pas de populistes se croyant investis d’une mission divine, ce sont des dirigeants immatures, déconnectés des véritables enjeux du continent, plus attirés par les privilèges matériels du pouvoir que par le sens des responsabilités. Hélas !

Boubacar Sanso Barry

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