Un vent de colère a soufflé sur Sonfonia T6 lundi. Des femmes riveraines de l’usine chinoise Enam Chine, spécialisée dans la fabrication de matériaux de construction, ont organisé une manifestation spontanée pour dénoncer les nuisances environnementales dont elles s’estiment victimes.
Selon les manifestantes, cette entreprise serait à l’origine des fréquentes inondations qui touchent le quartier, notamment en cette saison des pluies.
« Franchement, cette situation est insupportable. En saison sèche, c’est la poussière qui envahit nos maisons. En saison pluvieuse, c’est l’inondation. Dès qu’il commence à pleuvoir, on ne dort plus. On passe la nuit à surveiller la montée des eaux, de peur qu’elles n’envahissent nos concessions », déplore Aïssatou Bobo Diallo, l’une des porte-voix du mouvement.
Très remontée, elle pointe du doigt le système d’évacuation mis en place par l’entreprise chinoise.
« Ils ont bloqué les canalisations. Toute l’eau de pluie est redirigée vers nos habitations. Chez eux, il n’y a pas une goutte d’eau. Ils ont installé de gros tuyaux qui déversent tout chez nous, mettant en danger nos enfants. La semaine dernière, grâce à l’intervention rapide de nos boulangers du quartier, un drame a été évité de justesse. Sinon, des enfants de 3 à 4 ans auraient pu être emportés par les eaux », raconte-t-elle avec émotion.
Face à cette situation jugée intenable, les femmes affirment avoir tenté, en vain, d’interpeller les responsables de l’usine.
« Nous avons essayé de dialoguer avec eux, mais les gardiens nous empêchent d’accéder à l’entreprise. Quand on réussit à parler à quelqu’un, il promet de transmettre le message… mais rien ne change. Nos appels sont ignorés. Pourtant, ce sont nos enfants qu’ils emploient. On ne peut pas rester silencieux. La Guinée appartient à nous tous. Nous en appelons solennellement aux autorités. Les militaires, policiers, et gendarmes n’ont rien pu faire. Il faut que l’État prenne ses responsabilités. Cette pluie nous a traumatisés », martèle Aïssatou.
Le président du Conseil de quartier, Alpha Bocar Diallo, confirme la gravité de la situation.
« Selon les femmes, l’entreprise a barré une voie d’accès en empiétant sur le passage public. La production des dalles génère aussi une poussière épaisse, insupportable en toute saison. J’ai demandé aux femmes de constituer un comité pour rédiger une plainte. Une fois cela fait, nous transmettrons le dossier à la commune », a-t-il déclaré.
Il précise avoir mené plusieurs démarches sans succès.
« Depuis mon entrée en fonction, je me suis rendu à quatre reprises à l’usine avec des responsables du secteur, mais nous n’avons reçu aucune réponse concrète. L’eau de ruissellement a même endommagé la cour de SOS. C’est pourquoi j’ai demandé à la population de garder son calme. Nous sommes dans un État de droit, et une fois les documents formalisés, nous les transmettrons aux autorités compétentes pour un traitement au plus haut niveau », dit-il.
À ce jour, les multiples tentatives de la presse pour obtenir la version de la société chinoise Enam Chine sont restées sans réponse.
Pour rappel, les fortes pluies de ces derniers jours à Conakry ont déjà causé la mort de 18 personnes et fait un disparu, selon les chiffres de l’Agence nationale de gestion des urgences (ANGUCH).
Aminata Camara