Si ces derniers jours, une sortie a particulièrement fait parler dans l’opinion publique, c’est bien celle du premier ministre, Mohamed Béavogui, face aux jeunes de N’zérékoré. Ce discours dans lequel on a entendu le locataire du palais de la colombe inviter son auditoire à ne pas « mourir pour les autres ». Coïncidant avec un contexte sociopolitique marqué d’une part, par la menace de manifestations que brandit la classe politique et de la société civile, et de l’autre, par l’interdiction des manifestations par le CNRD, le discours de Mohamed Béavogui a laissé croire que ce dernier dissuadait ainsi les jeunes à obéir aux prochain mots d’ordre de manifestation. Et que par la même occasion, il insinuait que manifester équivalait à se faire tuer. Pourtant, il ne s’agirait que d’une simple coïncidence.
De fait, nous dit-on dans l’entourage du premier ministre, il fallait intégrer le contexte dans lequel le discours a été tenu pour comprendre celui-ci. Selon nos informations, le chef du gouvernement sortait en effet d’une rencontre avec les sages des différentes communautés cohabitant à N’zérékoré. Rencontre au cours de laquelle ces derniers lui ont fait part de leurs préoccupations au sujet des tensions intercommunautaires et au risque d’explosion dont celles-ci sont porteuses. A l’occasion, les sages ont particulièrement insisté sur le caractère fragile du contexte sociopolitique qui prévaut à N’zérékoré. En sorte que derrière l’apparente cohésion que l’on peut remarquer de dehors, se cacheraient des lignes de fractures très marquées.
C’est donc au sortir de cette rencontre que le premier ministre est allé au-devant des jeunes. Et son message était, nous souffle-t-on, en rapport avec les inquiétudes confiées à Mohamed Béavogui par les sages de N’zérékoré. Autrement, son message avait pour objectif de dissuader les jeunes à se laisser entrainer dans la spirale des violences inter-communautaires dont cette ville est malheureusement coutumière. Le PM pensait donc local. A propos, voici le discours qu’il tenait plus tôt à Macenta : « Je vais vous dire aussi que là-bas [à l’étranger] quand j’ouvrais la télévision ou je lisais les réseaux sociaux et que, ici à Macenta, on se frappait, on cassait me demandais des maisons, les jeunes mourraient, j’avais mal. J’avais très mal, parce que je pourquoi ça doit se passer chez moi ? Pourquoi chez moi ? Qu’est-ce qu’on a fait pour qu’on s’entretue ? Pour qu’on brûle nos maisons ? Pour qu’on se blesse ? Pourquoi ? Et ça, jusqu’à présent, je n’ai pas compris. J’espère que je ne comprendrais jamais, parce que ça ne se répètera jamais. N’est-ce pas que ça ne se répétera jamais ? Les jeunes, refusez de mourir pour quelqu’un d’autre. Mourrez pour vous-mêmes. Et vous-mêmes, c’est quoi ? C’est votre avenir. N’acceptez pas ! Papas, mamans, n’acceptez pas que vos enfants meurent pour des bêtises. Je vous en prie. A partir de maintenant, Macenta va devenir l’exemple d’unité et de rassemblement. Quel que soit le problème qui se pose, on s’assoit, on parle ». Et c’est pratiquement le même message que Mohamed Béavogui tenait à faire passer aux jeunes de N’zérékoré. Il pourrait donc bel et bien s’agir des violences inter-communautaires qui menacent particulièrement la cohésion nationale et que tout le monde condamne, à priori.
Mais il est tout à fait compréhensible qu’au sein de l’opinion publique, n’ayant pas ce contexte, certains acteurs aient pu faire le lien avec le climat sociopolitique. Mais il n’en était vraisemblablement rien.
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