À Boké, les vacances scolaires ne riment pas forcément avec repos ou loisirs. Dans cette ville minière de l’ouest guinéen, de nombreuses jeunes filles troquent cahiers et stylos contre des plateaux de vente, sillonnant les rues pour gagner de quoi préparer la rentrée scolaire. Une réalité sociale de plus en plus visible, qui inquiète les encadreurs pédagogiques.
De Tamakéné aux 400 Bâtiments, en passant par le marché Hangar ou la 110e Rue, des adolescentes arpentent chaque jour les artères de la ville, un plateau sur la tête, vendant vêtements, eau fraîche ou galettes. Ces activités, souvent perçues comme anodines, traduisent pourtant une précarité tenace.
Faou Oularé, 12 ans, élève en 9e année au Groupe Scolaire Sacré-Cœur, témoigne :
« Pendant les vacances, je prends des habits à crédit chez des gens pour les revendre. Je travaille de 9h à 15h. Je peux gagner 10 000 francs guinéens par jour. À la fin des vacances, j’arrive à économiser entre 300 000 et 400 000 GNF pour acheter mes fournitures ».
Delphine Guilavogui, collégienne au Groupe Scolaire Mission Khalima, vit la même réalité.
« Je vends des habits et des poupées pendant les vacances. Je me rends à Dibiya, au marché Hangar, à la 110e Rue ou à la Place des Martyrs. Je gagne environ 10 000 GNF par jour. Mais avec la pluie, ce n’est pas facile. Et les clients veulent toujours baisser les prix alors que les articles ne nous appartiennent pas. Le soir, j’essaie de réviser un peu à la maison », a-t-elle confié.
Ces situations, bien que courageuses, ne sont pas sans conséquences. Le principal du collège Al Rahma, situé au Centre Socio-éducatif de Boké, tire la sonnette d’alarme :
« Les vacances ne doivent pas être un moment d’abandon scolaire. Les parents doivent encadrer leurs enfants même hors période de classe. Les laisser faire du commerce, c’est risquer qu’ils perdent leurs acquis scolaires. L’éducation doit rester la priorité ».
Au-delà de l’aspect pédagogique, ces jeunes filles sont aussi exposées à des dangers multiples, notamment durant cette saison des pluies où l’insécurité urbaine et les accidents sont plus fréquents.
Dans une ville où les conditions de vie restent difficiles pour beaucoup de familles, les vacances deviennent un champ de débrouillardise, parfois au détriment de l’enfance et de l’avenir.
Mamadou BAH, depuis Boké