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Présidentielle : Amadou Thierno Diallo dénonce un « piège électoral » autour des candidatures indépendantes

Initialement candidat indépendant à l’élection présidentielle du 28 décembre 2025, Amadou Thierno Diallo, ancien ministre de la Coopération et de l’Intégration africaine, dénonce un processus électoral entaché de violations flagrantes des règles du jeu. Face à ce qu’il qualifie de “biais institutionnel” dès le départ, notamment sur la question du parrainage des candidats indépendants, l’ancien ministre affirme avoir été contraint de revoir sa stratégie. Désormais, il compte se lancer dans la course sous la bannière d’un parti politique, tout en maintenant sa vision pour la Guinée. Il l’a fait savoir lors d’un entretien accordé à la presse.

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Ledjely.com: Au départ, vous vouliez vous présenter en tant que candidat indépendant. Mais aujourd’hui, vous allez finalement être investi par un parti politique. Pourquoi ce changement ?

Amadou Thierno Diallo : Tout le monde avait applaudi l’inclusion des candidatures indépendantes pour les élections, toutes les élections en Guinée. Mais en réalité, on se rend compte que ce n’était pas le cas.

Les gens n’ont pas compris ce qu’est la candidature indépendante. Et c’est dommage, parce que dès le début du processus, on commence à violer notre Constitution, qui n’a même pas un mois. On demande à ce que les candidats indépendants soient parrainés par des maires.

Et tout le monde sait qu’il n’y a pas de maires en Guinée. À la fin du Code électoral, on dit que ce sont les présidents des conseils et des délégations spéciales qui doivent parrainer. Il y a déjà une faute là-bas. Nous savons que “maire” n’est pas la même chose qu’un “président de délégation spéciale”. Ce n’est pas la même émanation.

Les maires sont l’émanation du peuple, tandis que les présidents des délégations spéciales sont nommés par arrêté, même pas par décret. Donc ce n’est pas un parrainage citoyen.

On a biaisé le système. On demande ensuite aux candidats, indépendants ou issus de partis politiques, de se faire représenter au niveau du ministère de l’Administration du territoire et de la Décentralisation, chacun devant envoyer un mandataire. Et c’est après cela qu’on livre le Code électoral.

C’est une autre violation, car si le Code électoral avait été diffusé avant la désignation des mandataires, il n’y aurait probablement pas eu de candidats indépendants. On veut faire croire qu’il y a eu ouverture avec une dizaine de candidatures indépendantes, mais en réalité, ce n’était pas le cas. C’est dommage qu’une Constitution qui n’a même pas un mois soit déjà violée.

Qu’est-ce qui vous a réellement bloqué dans votre démarche ? Est-ce le parrainage que vous n’avez pas obtenu ?

Deux choses m’ont bloqué. Premièrement, on dit que c’est le maire, puis on dit que ce sont les présidents des délégations spéciales. C’est la loi. Quand vous déposez vos dossiers à la Cour suprême, ils vont lire la loi. Ce n’est pas la DGE qui va statuer. Vous avez plusieurs personnes au niveau de la Cour suprême. Certainement, il y en aura un qui dira : non, “maire” et “président de délégation spéciale”, ce n’est pas la même chose. Donc, on peut rejeter votre candidature tout de suite. Et vous n’avez pas de recours.

Deuxièmement, je ne sais pas si c’est une intoxication ou non, mais on dit que tous les présidents de délégations spéciales ont déjà parrainé quelqu’un. Qui ? Je ne sais pas. Mais c’est ce qui circule. Donc vous ne pouvez pas aller chercher de parrainage.

Et troisièmement, les maires n’étant plus là, les présidents de délégations sont nommés par arrêté. Dites-moi un seul président de délégation spéciale nommé par arrêté ministériel qui va parrainer un candidat indépendant. C’est impossible, parce que s’il le fait, il risque d’être démis.

Tout cela montre que le parrainage n’est qu’un piège. Et c’est dommage que, même à la fin d’une transition où l’on parle de transparence, on continue à jouer à ce jeu. On espérait que la lettre et l’esprit de la Constitution allaient être respectés, mais on se rend compte que non.

Qu’allez-vous faire désormais ? Allez-vous abandonner votre candidature indépendante ?

Il y a toujours un plan A et un plan B. Mon souhait était d’être un candidat indépendant. Malheureusement, cette voie est bloquée. Mais je suis membre d’un parti et je peux être candidat de ce parti. Donc le plan B va se mettre en place, et on verra ce que cela va donner. Permettez-moi simplement de ne pas encore donner le nom du parti. Peut-être que dans une semaine ou deux, je vous le dirai.

Vous dites que le processus est biaisé. Pourtant, vous comptez toujours vous présenter. N’est-ce pas peine perdue ?

Écoutez, quand on n’essaie pas, on ne peut pas savoir ce qui va se passer. Si la candidature indépendante est déjà biaisée et bloquée, il existe une autre voie, et c’est celle que nous explorons. Nous ne savons pas quelles autres difficultés seront mises sur notre chemin.

Mais encore une fois, si on n’essaie pas, on ne saura pas. Nous avons décidé d’aller à cette élection, et quelles que soient les difficultés, à moins qu’on nous empêche d’être candidats, nous serons candidats à la candidature.

Vous passez d’une candidature indépendante à un investissement par un parti politique. Est-ce que votre projet de société restera le même ?

Le parti a une vision. Moi, Amadou Thierno Diallo, j’ai aussi une vision pour la Guinée, et c’est celle que je viendrai défendre.

Vous savez, le parti peut avoir sa vision, mais c’est le candidat qui est élu. Et s’il est élu, c’est lui qui met en œuvre son programme. Cela ne signifie pas uniquement le programme du parti.

Quand on est élu président, on devient président de toute la Guinée. Il faut donc faire la synthèse de tous les programmes, de toutes les bonnes initiatives, pour mettre en place une vision commune. Mon programme, c’est ma vision, que je chercherai à concrétiser, tout en intégrant les bonnes idées des uns et des autres pour transformer ce pays.

D’autres candidats estiment que la caution fixée pour les élections est exorbitante. Êtes-vous d’accord avec eux ?

Je vais commencer par dire que pour moi, ce n’est pas le montant, mais le principe qui pose problème. Une commission financière a été mise en place pour discuter avec les autorités et proposer un montant. Mais à l’arrivée, ce montant a été majoré. Sur quelle base ? Pourquoi créer une commission si tout est déjà décidé d’avance ?

Encore une fois, on viole nos règles et nos procédures. Ce n’est pas parce que le montant est passé de 815 à 900 millions que cela change quelque chose. Quiconque peut mobiliser 815 millions pourra mobiliser 900 millions.

Pour moi, c’est le principe qui a été violé. Et surtout, pourquoi 900 millions dans un pays où le pouvoir d’achat est aussi faible ? Ce montant exclut des candidats qui auraient pu valablement être élus et mettre en place des politiques publiques efficaces.

Personnellement, je ne trouve pas de difficultés à mobiliser cette somme. Je dirais même que je demanderai au gouvernement de me rembourser mon argent. Quand j’étais ministre, l’État me doit plus de 300 millions de francs guinéens. J’ai tout fait pour récupérer ces fonds, preuves à l’appui, sans succès. Peut-être que ce sera l’occasion de me rembourser ce que j’avais investi pour le ministère, jusqu’à payer de ma poche l’hébergement du site ou la réparation du véhicule ministériel.

Certains redoutent une candidature du général Mamadi Doumbouya, malgré son engagement de ne pas se présenter. Quelle est votre analyse ?

Je vois la question différemment. Tant qu’il ne sort pas pour dire qu’il est candidat, je crois en sa parole de soldat.

J’ai vécu longtemps aux États-Unis, à l’époque du général Colin Powell. La parole d’un soldat, c’est sacré, presque comme la parole du Coran.

Pour moi, il a pris un engagement devant la population guinéenne et la communauté internationale, et j’y crois fermement. Même si certains mouvements tentent de le pousser à être candidat, il faut se rappeler que ce sont toujours les mêmes personnes. Chaque fois qu’un président veut prolonger son mandat, ce sont les mêmes visages. Et le jour où ce président part, ces mêmes personnes changent de camp.

J’espère que le président entendra raison et qu’il aura pitié de ce pays, qui doit enfin devenir normal après 67 ans d’indépendance. Nous venons de célébrer cette date, mais nous n’avons pas grand-chose à célébrer. Il faut mettre fin à ce cycle.

Quelles garanties réclamez-vous pour que ce scrutin soit équitable et transparent ?

Pour que le jeu soit franc et que tout le monde ait sa chance, il faut déjà respecter le parrainage citoyen. Si le Code électoral parle des maires, alors mettons en place les maires élus pour qu’ils puissent parrainer librement.

Ensuite, il faut mettre en place un organe électoral indépendant. Pourquoi attendre les élections sénatoriales pour le faire ? Cela ne demande pas beaucoup de temps. Un tel organe pourrait instaurer des règles claires et transparentes, permettant à tous les candidats de concourir sur un pied d’égalité.

Nous ne sommes pas naïfs. Ce que nous voyons aujourd’hui ne nous rassure pas. Mais comme on nous l’impose, nous irons tout de même jusqu’au bout.

Enfin, je souhaite que les institutions internationales, comme la Francophonie, fassent partie du processus pour garantir que le nom qui sortira des urnes soit celui réellement choisi par le peuple guinéen. C’est ainsi qu’on évitera toute contestation et qu’on rendra le scrutin légitime.

N’Famoussa Siby

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