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RD Congo : un verdict inutilement sévère contre Kabila

La sentence prononcée contre Joseph Kabila n’a rien de surprenant, tant les autorités congolaises semblaient déterminées à faire de son cas un exemple. Mais les juges de la Haute Cour militaire de Kinshasa sont allés bien au-delà des attentes, y compris de celles des représentants des victimes des crimes imputés à l’ancien président. En le condamnant à la peine de mort pour « trahison » et « crimes de guerre », le verdict risque fort, contrairement aux attentes de Kinshasa, de se révéler contre-productif. Certes, l’ancien chef de l’Etat n’a jamais été un enfant de chœur, mais une sanction aussi sévère est de nature à le radicaliser et à l’inciter à recourir à des approches plus périlleuses pour la paix au Congo. Sans oublier les répercussions attendues, tant sur le climat politique interne que sur les processus de paix pilotés depuis l’extérieur.

Il y a six ans à peine, Félix Tshisekedi et Joseph Kabila passaient pour des alliés politiques de circonstance. Contraint par la pression populaire de quitter le pouvoir, au terme d’un mandat prolongé de deux ans, Kabila avait conclu avec Tshisekedi un improbable deal politique destiné à barrer la route à Martin Fayulu, l’opposant favori de la présidentielle. En optant pour cette manœuvre en contradiction avec le choix authentique des électeurs congolais, l’ancien président pensait sans doute pouvoir manipuler à sa guise un Tshisekedi qu’il jugeait plus naïf. Après le verdict d’hier, il doit certainement s’en mordre les doigts.

Car, quoi qu’en disent ses partisans, la peine de mort qui vient de lui être infligée constitue un obstacle supplémentaire sur sa route. D’abord, cette condamnation le rend encore moins fréquentable qu’il ne l’était déjà. Dans l’éventualité très probable d’un mandat d’arrêt qui serait émis en vue de son arrestation, il devra désormais surveiller ses fréquentations et ses déplacements, la moindre imprudence pouvant lui coûter cher. Conséquemment, ses chances d’influencer le destin de son pays par les voies normales se trouvent réduites à néant. Son influence politique risque d’en être considérablement affaiblie.

Pour autant, les autorités congolaises devraient se garder de crier victoire. Bien sûr, Joseph Kabila n’a pas grand-chose pour éviter ces ennuis. C’est même bien plus la sévérité de la peine qui interroge, que le principe même d’une sanction. N’empêche que la décision rendue par la Haute cour militaire comporte plus de risques que de solutions pour le Congo. Dans un pays habitué aux rébellions armées, un verdict aussi lourd peut servir de prétexte – presque compréhensible – à un soulèvement armé de la part de l’ancien président et de ses soutiens. Or, l’Etat congolais a déjà montré ses limites dans la défense de l’intégrité du territoire et dans la garantie de la sécurité de ses citoyens. Une telle réaction pourrait d’ailleurs être perçue comme une stratégie ultime de survie, d’autant que l’on s’attend à ce que d’autres acteurs politiques, notamment de l’opposition, refusent désormais de collaborer avec Kabila.

Par ailleurs, il n’est pas exclu qu’une peine aussi extrême refroidisse les mouvements armés actuellement engagés dans des processus de paix avec le pouvoir de Tshisekedi. Dans le cas de l’AFC/M23, cette hypothèse est d’autant plus plausible qu’entre la rébellion dirigée par Corneille Nangaa et l’ancien dirigeant congolais, de forts soupçons de connivence ont toujours existé.
On s’attend même à ce que le verdict rendu ce mardi 30 septembre soit perçu, par l’opposition politique congolaise dans son ensemble, comme une manœuvre d’intimidation à l’encontre de toutes les voix dissidentes, en prévision du troisième mandat que Félix Tshisekedi caresse l’ambition de briguer en secret. C’est dire que la condamnation prononcée contre Kabila pourrait contribuer à dégrader davantage les rapports de confiance entre les acteurs de la scène politique congolaise. Une méfiance qui ne pourra que galvaniser ceux dont les intérêts prospèrent dans l’insécurité chronique qui sévit en RDC depuis une trentaine d’années.

Boubacar Sanso Barry

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