- Le paradoxe africain : Un continent jeune mais en retard technologique
Imaginez un monde où les voitures se conduisent toutes seules, où des robots opèrent des patients, ou où votre téléphone traduit instantanément toutes les langues. C’est la révolution technologique, menée par l’intelligence artificielle (IA) – des programmes informatiques qui imitent l’intelligence humaine.
Problème : L’Afrique a la population la plus jeune du monde (1 jeune sur 3 sera africain en 2035), mais elle produit moins de 1% des innovations en intelligence artificielle (IA) et possède moins de 2% des centres de données mondiaux (les « bibliothèques numériques » qui stockent les données d’Internet) .
Critique sur les réseaux mobiles : Pendant que l’Europe ou l’Asie déploient la 5G (ultra-rapide), la majorité des Africains utilisent encore la 3G ou 3.5G (lente et obsolète). La 4G reste rare : seuls 28% des pays africains l’ont généralisée.
Par exemple, au Burundi, la pénétration d’Internet n’est que de 5,3%.
Pourquoi c’est grave ?
Si le continent ne rattrape pas son retard, il risque de rester un simple consommateur de technologies étrangères, sans créer d’emplois locaux ni résoudre ses propres défis (santé, agriculture,éducative,…).
- Les racines du retard
Trois problèmes majeurs :
– Déficit infrastructurel : Seuls 5% des talents africains ont accès à des ordinateurs assez puissants pour l’IA. Les réseaux internet sont lents et chers : la vitesse moyenne de téléchargement est de 2,7 Mbps (Afrique) contre 5,2 Mbps dans le monde. Un forfait internet coûte en moyenne 37% du revenu mensuel d’un Africain .
– Sous-investissement chronique : Les États africains consacrent moins de 1% de leur budget à la recherche (contre 2,4% en Europe). Seuls 27% des pays ont une politique pour les nouvelles technologies comme l’IA .
– Exode des compétences : Faute d’opportunités locales, les diplômés en informatique partent travailler en Europe, aux États-Unis,….Pourtant, l’enjeu est colossal : l’IA pourrait ajouter 300 milliards de dollars au PIB africain d’ici 2030 selon McKinsey
Cas de la Guinée Conakry :
-Avec trois opérateurs mobiles pour environ 13 Millions d’habitants, seul un seul propose la 4G, uniquement dans certaines zones la capitale Conakry avec une connexion de merde.
– les autres sont bloqués en 3G/3.5G une connexion très lente et obsélete .
-Un forfait de 15 Go coûte plus de 185 000 GNF , soit 12% du salaire moyen .
– Résultat : 84% des Guinéens n’ont pas un accès fiable à Internet.
- Des lueurs d’espoir
Malgré tout, des initiatives émergent :
Start-up innovantes :
– En Côte d’Ivoire, Sellarts révolutionne la vente d’art africain (comme un « Amazon » local).
– Au Rwanda, des apps aident les agriculteurs à vendre leurs récoltes via mobile.
Politiques volontaristes :
– L’Éthiopie a lancé Digital Ethiopia 2025 pour généraliser le haut débit.
– Le Rwanda forme des milliers d’étudiants au codage.
Coopération internationale :
– L’Europe investit 150 milliards d’euros via Global Gateway pour étendre la fibre optique et les câbles sous-marins en Afrique .
4. propositions pour rattraper le retard
- Construire l’autoroute numérique:
– Tripler les centres de données (ex: partenariats avec l’UE).
-Généraliser la fibre optique en zone rurale
- Éduquer la génération tech :
– Apprendre le codage dès l’école primaire (comme au Rwanda).
– Créer des bourses pour garder les talents locaux.
- Un fonds pour l’innovation :
-5 milliards de dollars pour financer les start-up dans l’agriculture (AgriTech), la santé (MedTech)….
- Technologies adaptées aux réalités locales :
– Développer des IA hors connexion pour les zones sans internet (ex: diagnostics médicaux via SMS).
– Prioriser les solutions low-cost (ex: applications anti-criquets pour protéger les récoltes) .
5.Protéger l’Afrique numérique :
– Des lois sur la souveraineté des données pour éviter que les géants étrangers (Google, Meta, Huawei,…) ne contrôlent les données africaines.
– Réguler l’expérimentation technologique des multinationales sur le sol africain .
-La Stabilité politique et la bonne Gouvernance permettront de rattraper plus vite ce retard.
Conclusion : Le temps du sursaut
L’Afrique peut sauter des étapes (le leapfrog) :
- Résorber le retard réseau : Passer de la 3G à la 4G avant de viser la 5G.
- Investir dans l’éducation tech : Former 1 million de codeurs d’ici 2030.
- Créer un marché unique numérique via la Zone de libre-échange africaine (ZLECAf).
- S’unir face aux géants étrangers : L’Afrique doit coproduire, pas importer.
« Le continent ne doit pas copier les solutions venues d’ailleurs. Il a déjà inventé le mobile banking… Il doit maintenant imposer ses standards ! » .
Alhassane Bah, Ingénieur en Technologie Mobile à l’Université Polytechnique de Moscou