Avant l’avènement des smartphones, les photographes étaient incontournables lors des grandes cérémonies : baptêmes, mariages, fêtes ou réjouissances populaires. Leur rôle marquait la mémoire collective, immortalisant des instants précieux. Aujourd’hui, même si la profession n’a plus le prestige d’antan, certains jeunes continuent de s’y accrocher, animés par la passion et la quête d’un avenir meilleur. À l’occasion de la Journée internationale de la photographie ce mardi 19 août 2025, nous sommes allés à la rencontre d’un visage qui monte à Kankan : Ahmed Sékou Nabé.
Voix bien connue des auditeurs du Groupe Hadafo Média à Kankan, Ahmed Sékou Nabé a longtemps fait vibrer l’antenne locale, gravissant un à un les échelons jusqu’à être nommé chef d’antenne à Siguiri. Mais la fermeture brutale de plusieurs médias par les autorités de la transition a bouleversé son destin. « J’ai commencé la photographie en 2024, mais la passion était déjà en moi depuis l’université. Quand j’ai senti venir la fermeture de Hadafo, où je travaillais depuis 2021, j’ai décidé de me lancer. J’ai acheté mon premier appareil et suivi des formations à Conakry avant de créer mon entreprise, SAN Communication », confie-t-il.
En moins de deux ans, le jeune photographe s’est imposé comme une référence à Kankan. On le retrouve sur tous les grands rendez-vous sportifs, culturels ou politiques. Ses clichés, pris notamment lors de la traditionnelle mamaya ou encore du barbotage de la mare de Baro, ont largement circulé sur les réseaux sociaux. Son talent a été récompensé en juillet dernier par le prix du meilleur photographe de la ville.
« Grâce à mon entreprise, je décroche des contrats avec des institutions et des ONG. Ce prix m’a confirmé que j’ai fait le bon choix. Je peux dire sans exagérer que la photographie m’a sauvé du chômage qui a frappé beaucoup de confrères de Djoma, Hadafo et Fim », explique-t-il avec fierté.
Si la photographie lui a ouvert des portes, elle reste un métier exigeant et concurrentiel. « Avec l’évolution du secteur depuis l’arrivée du CNRD, les photographes sont devenus incontournables lors des événements. Mais le nombre de jeunes qui se lancent augmente chaque jour. Il faut donc travailler et se former sans relâche », insiste Ahmed Sékou Nabé.
Concernant les difficultés rencontrées dans l’exercice de sa profession, Ahmed Sékou Nabé évoque notamment la concurrence déloyale des jeunes utilisant des iPhones, ainsi que le désintérêt croissant de nombreuses personnes pour la photographie.
Au-delà d’un simple outil technique, la photographie s’impose comme un langage universel, capable de figer l’instant, raconter des histoires et susciter des émotions. Pour Ahmed Sékou Nabé, elle est surtout devenue une planche de salut et un nouveau chemin de vie.
Michel Yaradouno, depuis Kankan