Ils étaient 185 pays réunis à Genève, ville qui abrite l’Organisation des Nations unies (ONU), la Croix-Rouge et l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Leur objectif : s’accorder sur le tout premier traité mondial de lutte contre la pollution plastique. Après 11 jours de négociations intenses, aucun compromis n’a pu être trouvé. Une déception à la hauteur d’un enjeu qui concerne l’ensemble de l’humanité.
Pour Aliou Diallo, spécialiste des questions environnementales et militant engagé, cet échec était prévisible.
« Vous savez, la problématique des déchets plastiques intéresse tout le monde. Ce n’est ni l’Afrique, ni l’Europe, ni l’Amérique ou l’Asie qui est seule concernée. C’est le monde entier », a-t-il indiqué. Le sommet de Genève devait incarner cette prise de conscience collective. Mais il n’a pas accouché de l’accord espéré.
Selon lui, deux logiques irréconciliables se sont affrontées : l’économie et l’environnement. « Aujourd’hui, il y a deux enjeux majeurs. Le premier, c’est l’enjeu économique. Le second, c’est l’enjeu environnemental et sanitaire. Il y a des entreprises qui vont forcément perdre, d’autres qui risquent la faillite. Ce sont des intérêts énormes qui sont en jeu », a-t-il affirmé.
Les divergences étaient flagrantes à Genève. Tandis que de nombreux pays, notamment ceux du Pacifique, d’Afrique ou d’Europe, plaidaient pour une réduction progressive de la production de plastique, d’autres, en particulier les grands exportateurs de pétrole et de produits chimiques, refusaient toute contrainte directe. Ils privilégiaient le recyclage et la gestion des déchets, une approche jugée insuffisante par les partisans d’un traité ambitieux.
Les chiffres sont accablants : plus de 480 millions de tonnes de déchets plastiques sont produites chaque année dans le monde. Une grande partie finit dans les océans, les rivières ou les sols, ou est incinérée, libérant des substances toxiques. « Quand vous prenez les différentes eaux, les mers sont polluées partout par ces déchets plastiques. C’est une catastrophe », déplore Aliou Diallo.
Il avertit : sans réduction à la source, aucune politique de recyclage ne suffira. « Si on ne parvient pas à mettre fin à la production des plastiques à la base, dans les usines, dans les différentes entreprises, ces plastiques vont continuer à se transformer en déchets. Ils vont polluer l’environnement, dégrader les écosystèmes, créer des maladies, avec des impacts négatifs sur la vie humaine », a-t-il souligné.
Dans son intervention, il appelle à dépasser les logiques de profit. « Il faut mettre les considérations économiques, politiques, sociales et culturelles de côté, et placer l’intérêt humain au-devant de la scène. Parce que si l’argent que l’on gagne est ensuite dépensé dans les hôpitaux pour soigner des maladies causées par cette pollution, alors on construit d’un côté le bonheur et de l’autre le malheur », a-t-il martelé.
Pour lui, la solution n’est pas uniquement technique, mais avant tout politique et éthique. « L’homme étant au centre de tout cela, il faudrait que chacun mette de côté ses intérêts particuliers et pense à l’intérêt commun : la santé humaine et un environnement sain », a-t- souligné.
L’échec de Genève est un signal d’alarme. Il illustre le poids écrasant des intérêts industriels face à la survie des écosystèmes. Il montre aussi que, malgré l’urgence, le monde peine encore à parler d’une seule voix. Mais tout n’est pas perdu : un dernier cycle de négociations est prévu début 2026, avec l’espoir d’arracher enfin un compromis.
Thierno Amadou Diallo