Quatre ans jour pour jour après le coup d’État du 5 septembre 2021, qui a renversé le président Alpha Condé, les Guinéens commémorent l’arrivée au pouvoir du Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD) dirigé par le général Mamadi Doumbouya. Dans la préfecture de Boké, région stratégique et poumon minier du pays, les citoyens livrent des réactions contrastées sur le bilan de la transition.
Entre progrès tangibles et frustrations persistantes, les avis oscillent entre reconnaissance pour les avancées en matière d’infrastructures et inquiétudes face à la lenteur du processus politique ainsi qu’aux promesses sociales encore non tenues.
À Boké, nombreux sont ceux qui saluent les efforts consentis par les autorités de la transition, notamment dans le domaine des infrastructures routières et de l’accès à l’électricité.
« Cela faisait des années que notre route était impraticable. Il a fallu l’arrivée du CNRD pour que les choses changent. Aujourd’hui, la route nationale est bien bitumée entre Kolaboui, Boké et Sangarédi. On apprend même qu’elle sera prolongée jusqu’à Kamsar », témoigne avec satisfaction Djeneba Keita, résidente de Kolaboui. Elle se félicite également du lancement des travaux sur la route Boké–Quebo ainsi que de la construction d’une cité minière dans sa localité.
Même enthousiasme du côté de Salif Keita, coordinateur du Collectif des Jeunes Leaders de Kamsar.
« Quand tu regardes les routes, les logements sociaux, ce sont des choses que les citoyens attendaient, et le CNRD y a répondu. Beaucoup de jeunes ont aussi trouvé de l’emploi dans les mines, l’armée ou l’éducation. Maintenant, on demande à l’État de faciliter encore plus l’insertion des jeunes, surtout dans les zones minières », lance-t-il.
Cependant, l’embellie ne fait pas l’unanimité. Dans les quartiers populaires de la commune urbaine, certaines voix se montrent plus réservées, voire critiques.
À Yomboya, Aissatou Yarie Camara, commerçante, dresse un tableau plus nuancé.
« L’arrivée du CNRD a suscité beaucoup d’espoirs, mais aujourd’hui encore, nous avons des difficultés. Les prix ne cessent d’augmenter, nos enfants sont toujours au chômage alors que nous avions clairement exprimé ce besoin. Oui, les routes sont là, mais nous attendons du travail pour nos jeunes. À Boké, avec toutes les sociétés minières présentes, ce n’est pas normal. Nous espérons que les choses vont changer avec l’arrivée de Nimba Mining », confie-t-elle.
Un sentiment partagé par Sékou Camara, citoyen engagé, qui pointe un dysfonctionnement plus profond. « Ce que je déplore, c’est le non-respect de la convention collective des mines et carrières. L’État doit exiger des entreprises qu’elles respectent les accords qu’elles ont signés. Certains droits des travailleurs restent lettre morte », dénonce-t-il.
Pour Mamadou Lamarana Bah, coordinateur régional de la Maison des Associations et ONG (MAOG), le 5 septembre reste une date symbolique, mais l’heure est au bilan réaliste.
« Cette date représente une étape historique pour notre pays. Mais en quatre ans de transition, tout n’a pas été parfait. Il y a eu des avancées notables à Boké, notamment au niveau des infrastructures et de l’électricité. Ce sont des changements concrets dans le quotidien des populations. Cependant, sur le plan politique, les lignes n’ont pas beaucoup bougé », observe-t-il.
À l’approche d’une éventuelle sortie de transition, les citoyens de cette région stratégique attendent des engagements fermes de l’État : une meilleure gouvernance, le respect des droits socio-économiques, et surtout, une vision claire de l’avenir.
Mamadou Bah, depuis Boké