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CHANGEMENT DE NOM DE L’AEROPORT INTERNATIONAL DE CONAKRY : pourquoi il faut en parler ?

Pour l’auteur de cette tribune, les hautes sphères de décision des sociétés africaines continuent d’agir par l’émotion, par l’intuition et le ressentiment. C’est inquiétant. Nous avons besoin de renouer avec la raison.

Dans toutes les sociétés sérieuses, dites démocratiques, soucieuses de l’unité nationale, on ne se lève pas un bon matin prendre un décret ou un arrêté pour donner le nom d’un espace public, même à la plus petite échelle locale (le quartier), à plus forte raison un symbole à dimension nationale. On procède en général par ce que l’on appelle ‘une Commission toponymie’ qui réfléchit et propose une liste de personnalités qu’elle soumet à celui qui prendra la décision. D’ailleurs, avant même la mise en place de cette commission, s’il s’agit d’un symbole à une dimension nationale, il y a très souvent un rapport qui est commandité. Ce rapport est produit par un ou des historiens, afin d’évaluer l’impact sur l’unité nationale.

L’objectif de ce processus est d’atténuer les blessures s’il en existe et les sensibilités de certaines catégories sociales qui seraient affectées. D’autres vont encore plus loin aujourd’hui. Nombreux sont ceux qui, une fois une liste de personnalité établie, les élus, chefs d’Etat ou de gouvernement, élus de régions, de communes et même de quartiers,  soumettent le choix à la population, soit par un référendum ou par des votes en ligne. Tout ça pour légitimer ces décisions qui ne sont pas anodines.

Ahmed Sékou Touré mérite d’être célébré, c’est une évidence ! Toutefois, toute démarche qui consiste à imposer sans dialogue, sans prise en compte de certaines zones d’ombre de son parcours, va de facto créer un effet de rejet. Comme c’est le cas d’un grand nombre d’acteurs publics de premier plan, il n’y a pas que du positif dans ses actions, d’où la nécessité d’examiner en profondeur celles-là afin de le célébrer au mieux. Ceci est valable pour toutes les grandes personnalités.

Tout ça pour dire que cette décision n’est pas un facteur de réconciliation, elle n’est pas non plus légitime. La légitimité implique l’adhésion du peuple. La différence entre la mise sur le marché d’un produit par une entreprise et le choix d’un acteur public de donner un nom à un espace de bien commun, c’est que ce dernier crée un imaginaire collectif, une vision de ce qu’est ou doit être la société. Il a un effet sur le rapport que le citoyen va entretenir avec son pays, sa région, son quartier ; selon la sphère concernée. C’est pourquoi, une telle décision méritait réflexions et échanges.

A mon avis, cette décision du colonel Mamadi Doumbouya n’a pas pour but de heurter les sensibilités d’une catégorie de Guinéens. Cet avis est fondé sur les décisions courageuses qu’il a prises depuis le 05 septembre 2021. Par ailleurs, il faut oser le dire, lui n’a pas une ‘forte culture’ scientifique en histoire et en sciences politiques, qui l’aurait amené à s’interroger sur le symbole et les conséquences d’une telle décision pour certains Guinéens. Il n’est pas non plus un acteur politique historique sensibilisé sur ces sujets.

Toutefois,  je m’interroge sur son entourage et la culture politique et historique de ses conseillers politiques, leur vision de la Guinée, ou encore, leur vision de la réconciliation nationale. La question ici n’est pas le choix de AST, j’aurais le même avis si cela concernait Dinah Salifou ou d’autres. Le consensus et la justification doivent être de mise sur les choix politiques à fort enjeux symboliques. On ne peut pas continuer à faire des choix politiques conflictuels pour espérer construire un imaginaire collectif national.

Construire un roman national ne consiste pas à additionner des actes isolés pour satisfaire chaque catégorie sociale. Pour le cas de la Guinée, chaque ethnie. Car « imprimer » l’imaginaire collectif d’une société ne consiste pas en une addition de symboles. La démarche du choix de symboles compte plus que le symbole lui-même. 

Sadio Barry

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