Dans la région de Boké, le phénomène de l’immigration clandestine prend une ampleur inquiétante. Ce qui n’était autrefois que des cas isolés semble désormais se structurer en un véritable réseau, organisant des départs massifs vers l’Europe. Chaque semaine, de nouveaux points de départ apparaissent, et les itinéraires se font de plus en plus audacieux et périlleux. Le dernier épisode en date s’est déroulé ce jeudi 23 octobre 2025, à Bandedondé, un petit district relevant de la sous-préfecture de Tougnifily, dans la préfecture de Boffa. Soixante-cinq personnes, jeunes hommes et femmes, se préparaient à embarquer pour un voyage dangereux à travers l’océan Atlantique, lorsqu’elles ont été interceptées grâce à la vigilance des habitants.
Selon les témoignages recueillis sur place, tout est parti d’un simple soupçon. Des mouvements inhabituels, des visages étrangers au quartier, des murmures discrets… Très vite, la rumeur a circulé : un départ massif se préparait. Alertées, les autorités locales ont confirmé l’information.
« C’est grâce à la dénonciation citoyenne que l’opération a pu être menée à bien », a déclaré un journaliste local, soulignant le rôle déterminant des habitants dans cette interception.
Le président de la délégation spéciale de Tougnifily a confirmé que les migrants arrêtés ont été transférés à la Gendarmerie spéciale de Boffa. D’après une source proche du dossier, ces candidats à l’exil se trouvaient dans une maison isolée, attendant le signal pour rejoindre Sotti, un point de passage maritime situé dans la zone de Yambony, qui conduit directement à l’océan Atlantique. Ce trajet, souvent choisi par les passeurs, est connu pour sa dangerosité extrême : embarcations surchargées, absence de matériel de sécurité, et traversées longues et incertaines.

Ce démantèlement n’est qu’un épisode parmi d’autres. Depuis que le port de Kamsar est sous haute surveillance, les réseaux de passeurs ont dû se réinventer. Ils explorent désormais des zones moins surveillées, comme Boffa, ou se servent de sentiers et de petits ports clandestins pour échapper aux contrôles.
« Les contrôles se sont renforcés à Kamsar, alors ils se déplacent vers d’autres zones comme Boffa », explique un habitant qui a assisté à la scène.
La vigilance citoyenne, combinée aux actions des autorités locales, s’avère donc cruciale. Les habitants du district de Bandedondé ont joué un rôle actif en signalant les comportements suspects, permettant ainsi aux forces de sécurité de prévenir un départ massif. Ce type de coopération, entre citoyens et autorités, semble devenir un rempart essentiel face à la montée de l’émigration clandestine.
Par ailleurs, des experts mettent en garde : la situation risque de s’intensifier dans les mois à venir. Le phénomène migratoire en Guinée, comme dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, est alimenté par le chômage, la pauvreté et l’absence d’opportunités pour les jeunes. Beaucoup voient dans l’Europe un eldorado, ignorant souvent les dangers de la traversée et les réseaux mafieux qui les exploitent.
Mamadou Bah, depuis Boké


