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5 SEPTEMBRE : retour sur une journée que personne n’a vu venir

Depuis le 5 septembre dernier, beaucoup de choses ont été dites ou écrites sur cette folle journée qui a vu le Groupement des forces spéciales (GFS) déposer le président Alpha Condé. On a eu droit à tous les scénarii possibles et imaginables sur ce qui se serait passé dans l’enceinte du palais Sékhoutouréyah. Mais en réalité, on est loin de savoir ce qui s’y est réellement passé. D’autant que l’évènement a pris tout le monde de court. Au point que 100 jours après, on ne peut que retracer les péripéties de la journée.  

Le vendredi d’avant

Pour comprendre le caractère soudain et totalement inattendu de la capture du président Alpha Condé, au petit matin du dimanche 5 septembre 2021, il convient de rappeler que 48 heures plus tôt, tout ce que le pays comptait alors de hauts responsables se pliait en quatre pour l’honorer. On se souvient que le vendredi 3 septembre, le fameux déplacement du président Alpha Condé pour prendre part à la levée du corps de la fille de son premier ministre d’alors à l’hôpital sino-guinéen, avait de nouveau provoqué un embouteillage indescriptible dans la zone. On n’a pas non plus oublié ce fameux discours d’un certain Moalim Touré qui, s’adressant alors au même président Alpha Condé, priait pour que les « Guinéens ne disent jamais de lui voici notre ancien président ». Relayant le message de Dr. Ibrahima Kassory Fofana, le même Moalim disait au président d’alors que son premier ministre, même une fois démis de ses fonctions, s’engageait à le soutenir quand il sera prêt à rempiler pour un nouveau mandat en 2026. C’est dire qu’en ce vendredi matin, rien ne laissait présager les événements auxquels le monde entier allait assister le dimanche suivant.

Un indice

Justement, ce dimanche 5 septembre, c’est très tôt le matin qu’il est fait état de tirs à Kaloum, la commune qui abrite le palais de la présidence et de l’essentiel de l’administration. C’est précisément dans les bandes de 7 heures du matin que la nouvelle s’empare d’un seul coup de toute la capitale guinéenne. Mais dans un premier temps, personne ne se risque à imaginer qu’il s’agissait d’un coup d’Etat. On pense plutôt à une banale altercation entre des factions au sein de l’armée. Mais aux alentours de 8h30, une alerte de l’ambassade de France en direction de ses ressortissants donne un indice. En effet, le message évoque explicitement un « combat autour de la présidence ». Mais on ne s’y attarde pas suffisamment.

De fait, en onze ans de pouvoir, Alpha Condé s’est sorti de tellement de pétrins que ça ne paraissait pas réaliste d’envisager sa chute en ce dimanche matin. En Guinée, beaucoup avaient fini par se convaincre qu’il est véritablement invincible. Mais par-dessus tout, personne n’aurait pu songer que c’est l’armée guinéenne qui mettrait fin à son règne. Cette armée sur laquelle il avait pu compter pendant les plus fortes tensions.

Le communiqué de la confusion

Cette impression d’invincibilité de sa part allait d’ailleurs être un moment confortée par un communiqué signé du ministère de la Défense nationale. Distribué aux médias par le canal de la Cellule de communication du gouvernement, ce communiqué dispatché dans les bandes de 10 heures, disait notamment que « les insurgés ont semé la peur et troublé la quiétude des paisibles populations avant de se diriger vers le centre-ville aux abords du Palais présidentiel. La Garde présidentielle, appuyée par les forces de défense et de sécurité, loyalistes et républicaines, ont contenu la menace et repoussé le groupe d’assaillants ». Assurant en outre que « les opérations de sécurisation et de ratissage se poursuivent pour rétablir l’ordre et la paix », ce communiqué concluait que « Monsieur le Président de la République, Commandant en chef des Forces Armées, son Excellence Professeur Alpha Condé, et le Gouvernement appellent les populations au calme et les invitent à la vigilance pendant toute la durée des opérations militaires ». Aujourd’hui encore, on ne sait pas celui qui en était le signataire. Mais ce qui est sûr, c’est ce qu’au moment où on faisait circuler ce communiqué, le président Alpha Condé était déjà entre les mains des hommes du colonel Mamadi Doumbouya. Mais tout le monde se rappelle de la confusion que ce communiqué a provoquée.

Des preuves, des doutes

D’ailleurs, on peut imaginer que c’est en raison du doute suscité par la diffusion de ce document que les auteurs du coup d’Etat devaient quelques minutes après faire circuler les premières images du président de la République, entre les mains de ses ravisseurs. D’abord, à travers cette photo où l’on voit Alpha Condé, déchaussé et installé sur un canapé, entre deux membres des Forces spéciales. A la vue de cette photo, devenue virale en un laps de temps, les gens s’interrogent. Mais Alpha Condé étant passé maître dans l’art de renaître des cendres, on épouse encore la prudence. Puis, arrive cette courte vidéo où l’on voit le même Alpha Condé, installé sur le même canapé, se faire interroger par un élément des Forces spéciales. Cette fois, il devient évident que lui et ses compagnons ne sont pas des amis. On sent clairement que le président n’est pas là de gaieté de cœur. On réalise même que le rapport de force ne lui est pas favorable. Cette fois, les choses sont claires. On ne sait pas si le coup d’Etat va réussir, mais on est certain qu’il a été capturé. Cette certitude se confirmant avec une seconde vidéo où on voit le colosse Mamadi Doumbouya, s’appuyant sur une balustrade, faire sa première déclaration, dans laquelle il annonce l’arrestation et la détention du président Alpha Condé. « Incroyable, mais vrai », entend-on alors.

Les choses sont allées si vite et ont été menées avec une telle facilité que beaucoup mettent du temps à réaliser ce qui venait d’arriver. Alpha Condé qui avait résisté à dix ans de manifestations de ses opposants, venait de se faire capturer en moins de trois heures. Comment est-ce possible ? Aujourd’hui encore, on n’a pas la réponse à cette question.

Un spectacle humiliant

 

Mais cette question, les jeunes de Bambéto ne se la posent pas quand ils aperçoivent le président Alpha Condé, dans le véhicule du colonel Doumbouya, venu le leur offrir en trophée. Ils se contentent de savourer leur vengeance. S’agrippant à la voiture, ils huent l’ancien président. Celui-ci, les yeux hagards et la chemise défaite, ne peut que subir l’humiliant spectacle. Débarrassé de son pouvoir et lesté de ses forces, il a certainement conscience de sa vulnérabilité. Et c’est ainsi qu’il est acheminé de force à la RTG où le nouveau maître du pays allait faire cette déclaration officielle consacrant la fin d’un règne de onze ans.

Et depuis ce 5 septembre, chaque jour a apporté son lot de consolidation du pouvoir du colonel Mamadi Doumbouya et du CNRD…

Boubacar Sanso BARRY

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