Dans un village isolé situé à plus de 30 kilomètres du centre de la préfecture de Boffa, sous-préfecture de Kolia, l’éducation prend enfin racine après des années de lutte et de sacrifices. Le samedi 16 novembre 2024, l’école primaire de Popodjè, qui accueille désormais 135 élèves provenant de plus de dix villages environnants, a reçu un précieux don de fournitures scolaires (cahiers, sacs, bics, craies, ardoises…) grâce à l’association des ressortissants de Popodjè.
Construit en 2010, l’établissement de trois salles de classe et quatre latrines n’a pu fonctionner normalement pendant des années en raison du manque d’enseignants. En 2022, face à l’inaction des autorités, les ressortissants du village ont pris les choses en main, engageant un enseignant payé par la communauté. Aujourd’hui, deux enseignants se partagent la lourde tâche d’encadrer les quatre classes de la 1ère à la 4e année.
Pour Aguibou Baldé, précurseur et membre fondateur de l’association des ressortissants de Popodjè, ce don représente bien plus que des fournitures. « Ce don, c’est pour des élèves qui n’ont pas vraiment les moyens de s’acheter tout ce qu’il faut pour venir à l’école étudier normalement. Les parents ne vivent que de l’agriculture et de l’élevage. Nous nous sommes fixés comme objectif de trouver des personnes de bonne volonté pour aider ces enfants », dit-il.
L’initiative, qui a suscité une grande fierté parmi les habitants, symbolise une avancée majeure dans une région où l’éducation a longtemps été reléguée au second plan. « Au début, ce n’était pas facile de convaincre les parents d’envoyer leurs enfants à l’école au lieu de les emmener aux champs ou avec les bœufs. Mais aujourd’hui, ils comprennent l’importance des études. Le nombre d’élèves a plus que doublé en trois ans, passant de moins de 70 à 135 », ajoute-t-il.
Malgré cette dynamique positive, les défis restent colossaux. L’accès à l’eau potable, le désenclavement, et surtout, la création d’un centre de santé figurent parmi les priorités exprimées par les habitants. « Partout où il y a une grande école comme celle-ci, il faut un dispensaire. Les enfants sont vulnérables aux maladies. Nous avons aussi besoin de forages d’eau, car ceux que nous utilisons datent de plus de dix ans et commencent à lâcher », souligne Aguibou Baldé.
Aboubacar Demba Bangoura, le directeur de l’école, témoigne de son expérience unique dans ce village. Malgré les débuts difficiles dus à la barrière linguistique, il s’est adapté à la réalité locale et a vu sa carrière décoller grâce à son engagement. « Aujourd’hui, je suis fonctionnaire grâce à Popodjè. C’est ici que j’ai gagné mon avenir. Je prie pour que ce village forme de grandes personnalités et de bons cadres », indique-t-il.
L’histoire de Popodjè illustre les défis de nombreuses localités rurales en Guinée, où l’éducation peine à s’imposer face aux obstacles socio-économiques. Toutefois, la solidarité des ressortissants et la détermination des enseignants démontrent qu’avec de la volonté, des solutions sont possibles.
Les habitants espèrent que cette initiative sera pérennisée et qu’elle inspirera d’autres actions pour améliorer les conditions de vie et d’apprentissage dans cette région. L’éducation, pilier du développement, commence à prendre son envol à Popodjè, offrant ainsi une lueur d’espoir pour les générations futures.
Thierno Amadou Diallo