Située à 55 kilomètres du centre-ville de Kissidougou, la sous-préfecture de Banama, forte de ses sept districts, semble vivre en marge du développement. Ici, le manque criard d’infrastructures sociales de base complique le quotidien des populations : absence d’eau potable, routes impraticables, centres de santé sous-équipés. À Banama, vivre relève du parcours du combattant.
Des routes synonymes de calvaire
Le tronçon menant à Banama, quasi montagneux, est dans un état de dégradation avancé. Les usagers y passent des heures, coincés dans des véhicules ou sur des motos, respirant à pleins poumons une poussière suffocante. Pour les transports en commun, le trajet peut durer jusqu’à 15 heures, contre environ 5 heures à moto, au prix de secousses incessantes.
En saison sèche, la poussière envahit tout : vêtements et corps des passagers deviennent rougeâtres. En saison des pluies, la boue transforme la route en un véritable piège, rendant la circulation presque impossible. Tout au long de notre parcours, plusieurs véhicules en panne jonchaient la route, victimes de problèmes mécaniques, de crevaisons ou du manque de pièces de rechange.
L’eau potable, un luxe inaccessible
À Banama, l’agriculture et l’élevage constituent les principales sources de subsistance. Pourtant, l’accès à l’eau potable demeure un défi majeur. Il n’existe ni réseau fiable d’eau potable ni eau minérale disponible à la vente.
« Nous avons un sérieux problème de routes et d’eau. Quand vous empruntez une moto pour aller à Kissidougou, dès votre arrivée vous tombez malade tant la route est mauvaise à cause des secousses. Nous aimons notre président, Mamadi Doumbouya, et nous l’interpellons à faire face à nos problèmes », témoigne Marie Saran Kamano, épouse du sous-préfet.

Même son de cloche chez Bangaly 2 Diawara, enseignant à l’école primaire de Banama Centre depuis quatre ans : « La vie est très difficile ici à Banama. Pendant la saison sèche, on inhale beaucoup de poussière, mais on parvient tout de même à circuler. En saison des pluies, la route devient totalement impraticable et nous risquons parfois d’être coupés des autres villages. La distance entre Banama et le chef-lieu est de 55 km. À moto, ça passe difficilement, mais en voiture c’est un véritable calvaire. Des accidents sont souvent enregistrés. La semaine dernière, un véhicule s’est renversé le jour du marché hebdomadaire ».
Des conditions de vie précaires
La quasi-totalité des habitations de Banama est construite en terre battue et recouverte de toits en tôle. Ces maisons traduisent la précarité, mais aussi la résilience des populations, contraintes de lutter chaque jour pour satisfaire leurs besoins essentiels.
Sur le plan sanitaire, la situation est tout aussi alarmante. Le village ne dispose que d’un centre de santé rudimentaire, régulièrement dépourvu de médicaments et de personnel qualifié. Les malades issus des autres districts sont souvent transportés sur des hamacs, sur de longues distances, afin de recevoir des soins appropriés. Une épreuve particulièrement pénible pour les femmes enceintes, les enfants et les personnes âgées, mettant gravement en danger la santé communautaire.
L’éducation, un autre défi majeur
Dans cette sous-préfecture, l’unique école primaire manque cruellement d’enseignants et de manuels scolaires. Selon Bangaly 2 Diawara : « Les enseignants ne rêvent même pas de venir ici. Et même lorsque certains sont mutés, ils ne rejoignent pas leur poste. À Banama Centre, il n’y a que trois enseignants titulaires pour assurer tout le cycle primaire. Par exemple, au CP1, il y a deux salles de classe. En sixième année, on compte 65 candidats cette année. Au collège, les professeurs ne sont pas au complet. Il a fallu recruter des enseignants contractuels pour appuyer les titulaires. Dans des villages comme Masafindou, les écoles sont fermées par manque d’enseignants. À Kero, ce n’est que cette année qu’ils ont trouvé un seul enseignant pour tout le village ».
Ce déficit d’encadrement compromet sérieusement l’avenir des enfants et freine toute perspective de développement local.

Une soif quotidienne
Bien que Banama dispose de deux forages, ils restent largement insuffisants face à la croissance démographique. Les habitants dépendent essentiellement de puits traditionnels, souvent éloignés et exposés à la contamination. Femmes et enfants passent plusieurs heures par jour à la recherche de l’eau, au détriment de leur santé et de leur scolarité.
« De janvier à mars, toutes les sources tarissent. L’eau devient alors une denrée rare. Le village voisin de Mandian n’a jamais connu l’eau potable depuis sa création. À Banama, bien qu’il y ait deux forages, ils restent insuffisants au regard de la population. Pour toutes ces raisons, nous tendons la main à l’État et aux partenaires afin de nous venir en aide », explique un habitant.
À 12 kilomètres de Banama Centre, le district de Kero fait face aux mêmes difficultés. Selon Sâa Wondan Tolno : « Nous n’avons pas d’eau potable, alors que c’est un besoin vital. Les routes sont impraticables et le réseau téléphonique est presque inexistant. Pour passer un appel, il faut aller en brousse ou grimper à un arbre. Il n’y a pas de centre de santé. En cas de grossesse, nous transportons les femmes dans des hamacs jusqu’au centre de santé le plus proche. Là encore, c’est très compliqué, car il n’y a souvent ni médecin ni sage-femme qualifiée. Nous sommes parfois contraints de recourir à la médecine traditionnelle ».
Dans le district de Kassadou, la situation n’est guère meilleure.
« Nous souffrons énormément pour trouver de l’eau potable, surtout pendant la saison sèche, lorsque les sources tarissent. Quant aux routes, elles sont impraticables », alerte un citoyen.

Des doléances claires
Face à cette accumulation de difficultés, les populations de Banama et des localités environnantes interpellent les autorités et formulent plusieurs revendications, notamment :
- le reprofilage de la route Gbangbadou–Banama, longue de 40 km ;
- la construction d’un marché moderne avec hangars et 20 boutiques à Banama Centre ;
- la construction d’un centre de santé amélioré, doté d’équipements et d’ouvrages annexes ;
- l’installation de forages dans tous les districts de Banama ;
- l’équipement et l’électrification du foyer des jeunes.
À rappeler que la sous-préfecture de Banama compte sept districts et 42 villages ou secteurs, pour une population estimée à 12 092 habitants, dont 6 176 femmes.
Balla Yombouno


