Après l’annonce de son retrait du G5 Sahel, la junte malienne s’est de nouveau fendu tard dans la soirée de ce lundi 16 mai d’un communiqué laissant croire qu’elle a déjoué une tentative de coup d’Etat dans la nuit du 11 au 12 mai dernier. Ourdi avec le soutien de la France que l’on évoque en des termes à peine voilés, la tentative de putsch était menée, selon le communiqué par un « groupuscule d’officiers et de sous-officiers anti-progressistes ». Mais le colonel Assimi Goïta et ses camarades d’armes vont devoir fournir davantage d’indices et de preuves pour convaincre de l’effectivité de cette tentative de renversement du pouvoir. Autrement, le caractère laconique du communiqué qui tranche avec la gravité du sujet dont il est question, incline à penser que nous sommes en face d’un pouvoir qui use et abuse du complotisme.
Il ne faut certes pas croire à tout ce qui se raconte sur le pouvoir transitoire malien. Pour autant, il ne faut pas donner au colonel Assimi Goïta et à ses collaborateurs, le bon Dieu sans confession. Mieux, un pouvoir en rupture de ban avec la communauté internationale comme le sont aujourd’hui les autorités de la Transition maliennes, est potentiellement enclin à faire dans la manipulation. L’annonce de cette tentative de coup d’Etat peut en être une des manifestations. Les objectifs qui en sont escomptés pouvant être de deux ordres.
D’abord, la junte qui doit savoir que le soutien qu’il récolte du peuple malien résulte fondamentalement du différend avec l’ancienne puissance coloniale, peut être tentée d’exploiter à fond cette crise diplomatique. Quitte à forcer les traits. Or, dans le contexte de la tension actuelle entre Bamako et Paris, évoquer une tentative de coup d’Etat derrière laquelle se trouverait la France d’Emmanuel Macron, permet de réveiller ou d’entretenir le nationalisme de la part des populations. Après cinq mois d’embargo, cette recette-là est de nature à inciter les Maliens à tenir encore bon.
Ensuite, un coup d’Etat serait le parfait prétexte pour mettre hors d’état de nuire les empêcheurs de tourner en rond. Il suffirait de trouver un lien entre la tentative de putsch et les principaux contradicteurs du moment pour que les sanctions à infliger à ces derniers passent pour légitimes et justifiées aux yeux de l’opinion publique. Avec le statut de complice d’un complot visant à déstabiliser le pays et à saper les efforts de refondation de la Nation, on est bon à être jeté en prison.
Même si dans l’absolu l’effectivité de la tentative de coup d’Etat est de l’ordre du possible, il importe ici que la junte malienne en apporte des preuves qui permettent d’écarter tout doute. Autrement, on serait fondé à penser que tout cela est fruit d’une imagination débordante. Ce, pour des fins bien précises.
Boubacar Sanso BARRY