En ce début de semaine, il y a encore de nombreuses interrogations au sujet de l’attaque, le samedi dernier, contre la Maison centrale et l’exfiltration du capitaine Moussa Dadis Camara et Cie. Comment se fait-il que le commando ait pu aussi facilement accéder à cette prison stratégique installée dans la commune qui abrite le siège de la présidence de la République ? L’objectif se limitait-il à l’exfiltration de l’ancien chef de la junte et de ses co-accusés ? Ce sont notamment quelques-unes des questions qu’on se pose au sein de l’opinion publique. Des questions en partie nourries par les approximations et les lapsus qui ressortent de la communication des autorités et qui trahissent des non-dits et des zones d’ombre. L’illustration nous est ici donnée par la sortie du premier ministre, Bernard Goumou, en marge de la visite qu’il a rendue à une des familles victimes.
A la tête d’une forte délégation composée notamment des ministres de la Défense, de la Sécurité et de l’Administration du territoire, Bernard Goumou réagissant face à la presse, lâche notamment : « Dieu merci. Le chaos que les esprits maléfiques devraient provoquer suite à cet événement, a été stoppé. Ce chaos a été évité par le professionnalisme et le courage de nos forces de défense et de sécurité ».
Un « chaos » a donc été évité ? Cela laisse croire que les objectifs devaient aller au-delà de désir de faire évader des prisonniers. Même s’il est vrai que les détenus en question ne sont pas ordinaires, le projet de leur évasion en soi n’impliquait nécessairement un chaos. Ce qui fait que cette sortie du chef du gouvernement est peut-être accidentellement révélatrice d’un non-dit dans cette affaire.
Surtout que Bernard Goumou, en concluant son intervention et au nom du président de la Transition, rassure que « la Transition que nous avons commencée va arriver à bon port. C’est un engagement solennel. Nous mettrons tout en œuvre pour que cette transition-là arrive à bon port ». Là aussi, le lien ainsi implicitement établi entre l’attaque de la Maison centrale et une hypothétique menace sur l’issue de la Transition, n’était pas forcément anodin. Il vient plutôt renforcer l’idée qu’on n’a pas tout dit sur ce qui s’est passé.
Encore que Bernard Goumou n’est pas le seul qui ait laissé trainer un tel indice. En effet, le chef d’Etat-major général des armées, lui aussi, dans le premier communiqué qu’il avait publié dans la journée du samedi, indiquait que « cette attaque lâche vise à saboter les importantes reformes par le chef de l’Etat (…) dans le cadre de la refondation de notre Etat et dont les résultats sont déjà visibles sur le terrain ». Plus explicite encore, le général Ibrahima Sory Bangoura assurait, via le même communiqué : « Aucune tentative de déstabilisation n’arrêtera la marche de la refondation ».
Comme on le voit, il y a des raisons de penser que tout ne nous aura pas été dit. Et que probablement, le samedi dernier, c’est un autre ‘’5 septembre’’ qui a été évité.
Boubacar Sanso Barry