Depuis quelques mois, c’est le mantra du président américain. Donald Trump souhaite être le prochain récipiendaire du prix Nobel de la paix, à l’image d’un certain… Barack Obama. C’est pourquoi il s’intéresse à tous les foyers de conflit : de l’Ukraine à l’enclave de Gaza, en passant par la crise congolaise ou celle soudanaise. Mais comme l’a montré le flop de la rencontre du 15 août dernier entre le locataire de la Maison-Blanche et le maître du Kremlin, Trump est encore loin de la couronne qu’il convoite tant. Car au-delà de ses déclarations chocs sur son réseau Truth Social et de ses incohérences manifestes, l’efficacité ne suit pas toujours les nobles intentions dont il se dit porteur. Et en Afrique, on devrait donc faire preuve de prudence quant aux espoirs placés en Donald Trump, aussi bien à Kinshasa qu’à Khartoum.
Une condescendance à géométrie variable
Mais d’abord, faisons une observation. Finalement, l’imprévisibilité et la tendance du dirigeant américain à se jouer de ses homologues, il ne les exprime pas à l’égard de tout le monde. On se souvient de l’humiliation planétaire infligée à Volodymyr Zelensky en février dernier, mais aussi du traquenard tendu au président sud-africain Cyril Ramaphosa, lors de la visite de ce dernier à la Maison-Blanche en mai 2025. Plus récemment encore, il n’avait pas été particulièrement respectueux à l’égard des cinq dirigeants africains qu’il avait pourtant invités à le rencontrer. Entre son étonnement singulier devant la qualité de l’anglais parlé par le président libérien Boakai et l’ordre donné aux quatre autres de raccourcir leur présentation, Donald Trump a affiché une condescendance certaine envers les représentants du continent. Pourtant, vendredi dernier, à Anchorage, en Alaska, il n’a pas seulement été respectueux à l’égard de Poutine : il a fait preuve d’une véritable déférence envers le dirigeant russe. Il convient donc d’en tirer une conclusion : l’attitude de Trump dépend du poids de celui qu’il a en face. Or, le poids d’un dirigeant dépend de celui de son pays. Aux Africains d’en tirer tous les enseignements.
Fossé abyssal
Quant aux foyers de tension africains qui semblent intéresser le président américain, on est encore loin du compte. Comme du reste dans les guerres en Ukraine et à Gaza. Dans l’une et l’autre, il existe un fossé abyssal entre les déclarations du président américain, largement relayées et commentées dans la presse, et la réalité du terrain, où de pauvres innocents continuent de tomber chaque jour. Eh bien, il en est de même en RD Congo et au Soudan. Au Congo, en dehors de l’accord de fin juin annoncé tambour battant, on n’a pas grand-chose à se mettre sous la dent. Certes, début août, s’est tenue à Washington la première rencontre du comité mixte de surveillance de la mise en œuvre dudit accord. Mais tout cela relève du bla-bla diplomatique, alors que sur le terrain, on rapporte régulièrement des accrochages entre rebelles du M23 et groupes armés fidèles à Kinshasa.
La paix et la fraternité humaine…pour des glorioles et du business
De même, le 11 août dernier, Abdel Fattah al-Burhane, l’un des protagonistes de la guerre qui ravage le Soudan depuis avril 2023, et l’envoyé spécial américain pour l’Afrique, Massad Boulos, se sont discrètement rencontrés en Suisse. À cette occasion, ils auraient discuté d’un plan de paix global concocté par Washington. Mais là aussi, on en reste aux nobles intentions. Sur le terrain, des Soudanais meurent chaque jour, pris entre les feux des frères ennemis ou emportés par la crise humanitaire.
Ainsi donc, il faut en tirer des leçons. En réalité, Donald Trump, contrairement à l’image qu’il voudrait renvoyer, n’est pas nécessairement intéressé par la paix en tant que telle. De pauvres hères qui tombent par milliers dans un pays lointain ne lui inspirent aucune compassion. Ce qui l’intéresse, ce sont les glorioles et le business. La paix et la fraternité humaine ne sont pour lui que des marchepieds pour récolter des trophées symboliques et se faire plus d’argent.
Boubacar Sanso Barry