À Boké, la mendicité gagne du terrain. Dans les rues, aux abords des mosquées, des marchés ou encore aux feux tricolores, de nombreux jeunes valides sollicitent la charité publique. Une situation qui inquiète les autorités religieuses locales. Interrogé par notre correspondant, l’imam et chroniqueur Oustaz Ibrahim Khalil Diallo a tenu à rappeler que cette pratique est prohibée en islam, sauf en cas d’extrême nécessité.
Dans les rues de Boké, plusieurs habitants confirment ce constat. Mamadou Lamarana Diallo, commerçant au marché central, témoigne : « Chaque jour, des jeunes viennent me tendre la main. Mais quand tu leur proposes de venir aider à porter des marchandises ou à balayer, ils refusent. Ce n’est pas normal ».
Même son de cloche chez Fanta Diallo, vendeuse de légumes. « Certains mendiants gagnent plus que nous qui travaillons sous le soleil. Et ils reviennent chaque jour comme si c’était leur travail », déplore-t-elle.
Pour l’imam, l’islam valorise le travail au même titre que les actes cultuels comme la prière ou le jeûne. Il cite un épisode de la vie du Prophète Muhammad (PSL) : « Un homme passait tout son temps à la mosquée, uniquement dédié à l’adoration. Quand le Prophète lui demanda qui subvient à ses besoins, il répondit : “Mon frère”. Alors le Prophète déclara que son frère était meilleur que lui, car il travaillait, soutenait un autre, tout en accomplissant ses devoirs religieux ».
« L’islam valorise la main qui donne. Celui qui travaille et aide autrui est plus aimé d’Allah que celui qui reste passif en dépendant des autres », insiste Oustaz Diallo
Poursuivant, il explique que « La mendicité est une chose interdite en islam. Le Prophète (PSL) nous recommande de travailler et de subvenir à nos besoins. Il n’est pas permis de vivre aux dépens des autres sans nécessité absolue », a-t-il déclaré.
Pour l’imam, la mendicité devient un véritable fléau lorsqu’elle est volontaire :
- Sur le plan social : elle entretient la paresse et la dépendance ;
- Sur le plan économique : des personnes en âge de travailler deviennent un poids pour la société ;
- Sur le plan religieux : sans revenus, le musulman ne peut s’acquitter de certains devoirs comme la zakat ou le pèlerinage.
Toutefois, Oustaz Diallo nuance son propos : « Dans certains cas d’extrême détresse : voyageur bloqué, malade, handicapé, veuf(ve), surendetté l’islam autorise temporairement de demander de l’aide. Mais cela ne doit jamais devenir une habitude ou un métier ».
L’imam rappelle enfin que les plus aisés ont un rôle central à jouer.
« Le jour du jugement, Allah nous demandera des comptes pour chaque centime : comment on l’a obtenu et comment on l’a utilisé. Il faut que nos ressources et nos dépenses soient licites et justes », a-t-il averti.
À travers cet appel, Oustaz Ibrahim Khalil Diallo invite la population de Boké à renouer avec la dignité et l’effort. Selon lui, la lutte contre la mendicité passe à la fois par la responsabilité individuelle de ceux qui peuvent travailler, et par la solidarité des plus nantis envers les vrais nécessiteux.
Mamadou Bah, depuis Boké


