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Cameroun : Martinez Zogo, révélateur d’un régime à bout de souffle

Au Cameroun, l’enquête sur l’enlèvement puis l’assassinat du journaliste Martinez Zogo progresse plutôt bien. Heureusement, dirons-nous. Très rapidement, de gros clients sont tombés dans l’escarcelle des enquêteurs. Les suspects jusqu’ici mis aux arrêts sont d’un tel lien avec l’Etat camerounais qu’on serait tenté de sortir balafon et tam-tam pour saluer l’audace dont fait montre le pouvoir de Paul Biya. Mais au Cameroun justement, une hirondelle ne fait pas le printemps. Il faut attendre de voir comment tout cela sera bouclé pour se faire une idée plus juste. Parce qu’en réalité, cette affaire Martinez Zogo est partie pour étaler sur la place publique la face sombre d’un régime qui n’en a plus pour longtemps. Paul Biya qui souffle ses 90 bougies le 13 février prochain est au bout du rouleau. Et curieusement, l’affaire Martinez Zogo n’en est qu’un révélateur flagrant.

Une première hypothèse

Le lieutenant-colonel Justin Danwe, en charge des opérations à la Direction générale de la recherche extérieure (DGRE), le service du contre-espionnage, est le premier sur lequel les enquêteurs du Secrétariat d’Etat à la Défense (SED) ont mis le grappin. Et très vite, il se met à table. Reconnaissant avoir lui-même conduit le commando qui a arrêté, puis assassiné le célèbre animateur de l’émission ‘’Embouteillage’’ sur Amplitude FM, il met aussi en cause son patron, Léopold Maxime Eko Eko. Tout de suite, une première hypothèse émerge et s’impose : à minima, des services stratégiques de l’Etat ont pris part à l’opération d’élimination physique du journaliste, Martinez Zogo.

Amougou Bélinga, un monstre enfanté par l’Etat

Mais Justin Danwe ne s’en tient pas à la dénonciation de son chef hiérarchique. Surtout, il cite nommément Jean-Pierre Amougou Belinga, dont on peut dire qu’il s’est rendu puissant plus par ses liens avec l’Etat camerounais que par son sens des affaires. Le patron de L’anecdote de laquelle relèvent notamment les télévisions Vision 4 et Télésud serait même l’alpha et l’omega de l’opération qui a coûté la vie à notre confrère. Après l’avoir commanditée, il aurait participé à une partie de la séance de torture que celui-ci a subie avant de rendre l’âme. Séance de torture qui aurait par ailleurs eu lieu au sous-sol d’un des immeubles de l’homme d’affaires, qui était justement la cible de Martinez Zogo, dans le dernier numéro d’Embouteillage que le journaliste a animé. Parmi les proches de Jean-Pierre Amougou qui sont également arrêtés, on a aussi son beau-père et surtout ancien commandant de la garde présidentielle, Etoundi Nsoe. Enfin, même si lui n’est pas encore aux arrêts, de forts soupçons pèsent sur le ministre de la Justice, Laurent Esso.

Le président n’en a plus pour une éternité

Comme on le voit, derrière cette sombre et tragique affaire, se cache du beau monde. Et l’Etat camerounais est mouillé jusqu’au cou. D’où les raisons de rester suffisamment prudent quant à la capacité des enquêteurs à conduire le dossier jusqu’au bout et faire en sorte que la vérité jaillisse. Parce qu’il n’est pas impossible que l’on soit là au cœur d’une rude bataille de clans, en vue de la succession à Paul Biya. En effet, si ce dernier a fait montre d’une longévité particulière au sommet de l’Etat, il est désormais certain qu’il n’en a plus pour une éternité.

Chacun affute ses armes

L’horloge biologique faisant son œuvre, le président-fondateur est plus proche de la retraite qu’il ne l’imagine. Si lui-même n’en a pas conscience, autour de lui, personne ne l’ignore. Conséquence, chacun affute ses armes et se prépare à l’inévitable. Les gros scandales économiques dont la dénonciation a fini par emporter Martinez Zogo relèvent certainement de ces manœuvres-là. Chaque camp amassant le trésor de guerre, en prévision d’un affrontement qui s’annonce rude. Mais l’assassinat du journaliste est également symptomatique de tout ce qu’on est prêt à faire pour garder la fortune amassée. Enfin, l’implication des responsables très haut placés au sommet de l’Etat tend à confirmer la thèse selon laquelle nous sommes bien en présence d’une bataille féroce entre des clans opposés autour de Paul Biya.

Paul se soucie-t-il de l’après-Biya ?

Cette dimension de l’affaire Martinez Zogo, le président camerounais devrait lui-même s’en imprégner suffisamment. Il en tirerait comme principal enseignement qu’il rendrait au Cameroun, aux Camerounais et à l’Afrique toute entière, un fier service en organisant pendant qu’il est encore temps sa succession. Cela pourrait éviter que le pays ne plonge dans une crise aux conséquences imprévisibles le jour où il sera contraint à s’effacer brusquement. Mais Paul Biya se préoccupe-t-il de ce qui adviendra du Cameroun après lui ? C’est très peu probable !

Boubacar Sanso Barry

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