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Minorités en Guinée : les Bassari, une communauté qui peine à s’identifier  

L’ethnie « Bassari » fait partie des races dont l’histoire est marquée par une résistance farouche aux envahisseurs et une volonté de préserver leur culture. Pourtant, leur isolement géographique et leurs croyances les placent souvent en marge de la société guinéenne. Nous avons rencontré Jean Pierre Lama BOUBANE, porte-parole du peuple minoritaire de Guinée, pour évoquer avec lui des facteurs historiques et contemporains qui sont à la base de leur marginalisation et les défis auxquels ils sont confrontés.

Peuple d’Afrique de l’Ouest, le Bassari se trouve sur une chaîne de collines et de montagnes de part et d’autre de la frontière guinéo-sénégalaise, à l’ouest du Fouta-Djallon. Sauf que, leur existence et leur appartenance ethnique nationale restent méconnues par bon nombre de guinéens. « Beaucoup se trompent et ne savent pas qu’il y a d’autres communautés à l’intérieur du Fouta-Djallon, et ce sont d’ailleurs les autochtones. J’insiste sur cet aspect, parce que dans l’histoire du Fouta théocratique, ce sont les guerres historiques qui nous ont poussés à aller vers l’extrême ouest de ses chaînes de montagnes », regrette Jean pierre Lama Boubane.

Estimé au-delà de 15.000 habitants, ce peuple fait partie du groupe des ethnies minoritaires de Guinée réparties entre les « Badiar » et les « Tenda », constitué des  Bandjanranké, des Boin, des Bedik et des Coniagui. Mais qui, jusque-là, peine à s’identifier en tant que guinéen.

« Nous ne sommes pas intégrés dans ce qui se vit au niveau national. Dans l’Etat central, il n’y a pas de présence de Bassari, jusqu’aujourd’hui même pour les élections locales, nous n’arrivons pas à émerger dans notre propre territoire », explique-t-il.

Cette difficulté à se faire une place parmi les siens, oblige certains d’entre eux à renoncer à leur identité au détriment d’une autre : « Du coup, il y a eu beaucoup d’emprunts et d’assimilations. Certains sont devenus des Camara alors que nous avons des noms originaux qui annoncent notre identité », s’exclame-t-il, le visage souriant avant de poursuivre : « c’est pourquoi dès que nous nous présentons avec nos noms, nous sommes aussitôt marginalisés. Avec des reproches du genre, Boubane ce n’est pas un nom de famille guinéenne ça ».

Le père Sébastien Tama Bidiar est aussi victime de cette marginalisation dont témoigne Boubane. Il renchérit sur une expérience qui lui a singulièrement marqué lors de ces démarches pour l’obtention d’un passeport en Guinée : « Quand je suis allé à l’immigration, je me suis présenté pour dire que je veux un passeport. Lorsqu’ils ont vu mes papiers, ils ont dit que non, toi, tu n’es pas guinéen. Ils m’ont demandé de me référer à la hiérarchie supérieure qui va décider si je dois prendre un passeport ou pas, ou si je suis guinéen ou un imposteur », nous confie le curé de la paroisse Saint-Mathieu de Kountia.

Plus loin, Jean Pierre Lama Boubane, nous apprend que cette marginalisation s’étend dans tous les domaines, notamment celui de l’éducation, de l’emploi et de la santé. « Tout ne nous est pas donné facilement, je vous assure. Si je vous dis que dans tout le pays Bassari, c’est-à-dire cette partie est de Koundara après Ikokoune, il y a un seul poste de santé qui se situe à presque 55 km de Koundara. Mais qui n’a rien ! même les paracétamols manquent là-bas », déclare-t-il avec un air déçu, puis de poursuivre : « Si je vous dis au pays Bassari il y a des villages depuis 5 ans les enfants ne sont pas allés à l’école, vous ne pouvez pas croire et pourtant, c’est la vérité, six villages pratiquement ».

L’une des conséquences de ce manque d’intégration est l’exil volontaire des membres de la communauté Bassari au Sénégal pour garder au mieux leur identité culturelle : « Le fait qu’on n’a pas d’école dans nos villages, les Bassari sont en train de partir vers le Sénégal. Ils partent pour étudier, mais aussi pour gagner leurs vies. Sauf que par fini, ils s’implantent là-bas et prennent la nationalité sénégalaise. Et vous comprenez que c’est la Guinée qui perd parce que même nos frères qui sont là, la plupart ont des cartes d’identités sénégalaises, pourtant nous sommes guinéens avant tout », indique Père Sébastien Tama Bidiar.

Aujourd’hui, plusieurs aspects menacent de disparition, la communauté Bassari. Parmi lesquels figure la perte de sa langue « Oneyan » avec l’adoption des autres telles que : le wolof, le soussou, le pular. Sans oublier leur identité par assimilation ou usage d’autres prénoms et noms différents des leurs dont entre autres : Boubane, Bidiar, Bianquinch et Tama.

La JRI de l’ombre

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