Les électeurs sénégalais se sont déplacés ce dimanche 17 novembre, pour aller choisir leurs députés. Et ils l’auront fait dans le calme et la sérénité. Une atmosphère qu’il convient d’autant plus de saluer que l’on se rappelle la tension qui aura émaillé toute la durée de la campagne électorale. Les premières tendances sont sans équivoque : le Pastef de Ousmane Sonko, le premier ministre, se taille la part du lion. Face au parti au pouvoir, l’ancien président Macky et les autres n’auront pas fait le poids. Près de 8 mois après s’être offert la présidence le duo Sonko-Diomaye s’octroie donc le parlement. Désormais, le président et son premier ministre ont les leviers requis pour mettre en œuvre le programme de rupture au nom duquel les Sénégalais leur ont fait confiance. Et à l’heure du bilan, nous ferons les comptes.
En tant que telle, la victoire du parti au pouvoir ne surprend personne. Dans le sillage de la victoire qui a vu, le 24 mars dernier, Bassirou Diomaye Faye l’emporter dès le premier tour, il était évident que son parti gagnerait les législatives organisées moins d’un an après. Par contre, on ne savait quelle serait l’ampleur de la victoire. Eh bien, il semble qu’elle est très importante. Au point qu’on ne sait pas si le choix de l’ancien président de s’associer à ce scrutin n’y est pas pour quelque chose. Lui qui cristallisait la colère des Sénégalais il y a quelques mois encore a peut-être un peu trop précipité sa volonté de revenir au-devant de la scène. Certaines blessures de la crise préélectorale sénégalaise n’étant pas refermées, en offrant une nouvelle fois ce duel Macky-Sonko n’aura peut-être nécessaire aidé les siens.
Mais ce qui est fait est fait. Les Sénégalais se sont prononcés. Et ils l’ont largement fait en faveur de Ousmane Sonko, de Diomaye Faye et du Pastef. Le parti au pouvoir dont les précédents mois ont été quelque peu torpillés par l’ancienne majorité parlementaire, s’offre à son tour sa majorité. De quoi lui permettre d’appliquer son programme et d’opérer la rupture si chère au premier ministre sénégalais. Un atout sans doute. Mais aussi une responsabilité. Même si les leaders du Pastef auront jusqu’ici fait montre d’intelligence et d’une détermination à honorer leurs engagements, il y a qu’il n’est pas toujours évident de passer des engagements à leur réalisation. Parce qu’entre le projet et la réalité, le fossé peut être très grand. Or, dans le cas du Sénégal, le pouvoir ayant tous les leviers n’aura aucune échappatoire. Prions pour que les choses puissent marcher au profit du Sénégal et des Sénégalais. Mais si les résultats ne sont pas au rendez-vous, à l’heure du bilan, personne d’autre ne devra en porter la responsabilité. C’est cela aussi l’autre sens du vote d’hier au Sénégal.
Saluons de passage la maturité dont les Sénégalais, aussi bien chez les électeurs que chez les leaders, ont fait montre à l’occasion. Après une campagne électorale très tendue, la journée de vote d’hier a été calme. Aucun incident majeur. Un motif de fierté. L’autre attitude qui rassure, c’est cette galanterie et ce fair-play dont certains candidats défaits ont fait montre en félicitant ouvertement les vainqueurs. Après donc une campagne électorale au cours de laquelle certains de ses acteurs s’étaient laissé aller à des discours empreints d’émotion, on ne s’attendait pas forcément en particulier aux félicitations que les candidats Amadou Bah, ancien premier ministre et surtout candidat malheureux à la dernière présidentielle, et Barthelemy Dias, maire de Dakar, félicitent le premier ministre et son parti. Pourtant, ils l’ont fait via notamment des messages publiés sur les réseaux sociaux. Un geste qui, lui aussi, singularise le Sénégal.
Boubacar Sanso Barry