Sous un ciel nuageux, riche en particules fines, les populations de Conakry ainsi que des principales villes du pays peinent à respirer. Djenabou Chérif a été durement touché par les répercussions de cette pollution atmosphérique. C’est l’histoire de milliers de Guinéens qui, jour après jour, font face à cette situation, depuis un certain temps.
« J’ai l’impression que la qualité de l’air s’est dégradée de façon spectaculaire ces dernières années. Mon asthme, qui était déjà un problème, s’est considérablement aggravé. Actuellement, je suis obligée de prendre mes médicaments presque de manière continue et d’avoir toujours ma pompe à portée de main parce que mon lieu de travail se situe vers le rond-point de Kabgelen et, croyez-moi, ce tronçon est tellement poussiéreux ! Et le pire, c’est qu’avec les bavettes aussi, j’ai tendance à m’étouffer. Je peux vous assurer que c’est épuisant, tant physiquement que moralement », explique-t-elle, le regard rempli de frustrations.
Malheureusement, les problèmes auxquels Djenabou est confronté ne sont pas singuliers. Au cours des derniers mois, plusieurs patients présentant des symptômes liés à cette pollution ont consulté le Dr Ben Youssouf Keita, médecin généraliste, dans sa clinique.
« Dans nos consultations ici, nous avons reçu beaucoup de personnes qui viennent pour des grippes. Vous savez, les grippes, comme les rhinites, ce sont des maladies infectieuses virales qui se transmettent dans l’air, notamment quand vous toussez. Ces gouttelettes que vous propulsez peuvent contaminer votre voisinage et faire en sorte qu’il y ait beaucoup plus de personnes affectées par ça. Donc, la majeure partie des gens que nous recevons, ce sont des cas de grippe, de pharyngite, de rhinite et de bronchite », dit-il.
Selon les scientifiques, des facteurs tels que la combustion de biomasse, des émissaires de voiture, les activités industrielles pourraient être à la base de ce phénomène. Mais pour Kisango Konté, cette pollution de l’air n’est qu’une conséquence de l’activité humaine.
« Il faut savoir que la nature rend toujours coup pour coup les actions qui lui sont renvoyées d’une façon ou d’une autre. Voilà pourquoi, en dépit de cette poussière et des odeurs nauséabondes que nous vivons en ce moment en Guinée, nous assistons parfois à une extrême chaleur, bien que bien des rayons de soleil ne soient pas aussi importants. Toutes ces réactions sont des réponses de Dame Nature qui devraient vraiment nous alerter », affirme-t-il.
Poursuivant, ce naturaliste pointe également un doigt accusateur vers le gouvernement pour son non-respect des textes de loi visant à protéger la nature.
« Il y a réellement un non-respect dans la mise en pratique des textes de lois protégeant l’environnement. Il y a déficit d’agents forestiers pour veiller au respect du Code forestier. Manque conduisant à une surexploitation sans précédent. À cela s’ajoute l’exploitation minière à l’intérieur du pays, zones regorgeant le plus d’espèces végétales et animales et surtout propices à une vie hygiénique et paisible. Avant, l’intérieur du pays était convoité pour ces différents atouts incommensurables, mais maintenant, observez Fria, Boké, Siguiri… et voyez les conséquences des travaux miniers », exprime-t-il.
Face à cette situation alarmante, des solutions s’imposent. Respectivement, Dr Ben Youssouf Keita, médecin généraliste, et Kisango Konté, naturaliste passionné de l’environnement, proposent des pistes de solution pour améliorer la qualité de l’air à Conakry et environ et préserver la santé de ses habitants.
« Premièrement, il faut se protéger physiquement à travers les bavettes, à travers les habits appropriés et les lunettes de soleil ou d’autres types pouvant protéger les yeux contre une conjonctivite. Deuxièmement, il faut boire beaucoup d’eau et enfin consommer suffisamment de vitamine C à travers l’orange ou le citron », propose-t-il.
« Je pense que la Guinée au niveau national est dotée de lois comme le Code de l’environnement, le Code forestier et leurs sous-jacents ainsi que les conventions internationales que nous avons ratifiées comme :la Convention des Nations unies sur les changements climatiques, le Protocole de Kyoto… qui sont des outils juridiques pouvant faciliter et régulariser les problèmes environnementaux. J’invite donc les autorités chargées de cette problématique à les appliquer. Car même les règles coutumières comme la charte de Kèmèkiriya de l’empire Sosso, en ses articles 96 et 97, invitent à la préservation de la nature afin de mieux vivre en harmonie avec elle », indique-t-il.
JRI de l’ombre