Le monde célèbre ce 3 mai la Journée internationale de la liberté de la presse. Cette année, l’événement intervient dans un contexte particulier, marqué par la fermeture de plusieurs médias, la disparition de journalistes — dont notre confrère Habib Marouane Camara —, et des incertitudes croissantes sur l’avenir du métier. Le thème retenu cette année est : « Informer dans un monde complexe : l’impact de l’intelligence artificielle sur la liberté de la presse et les médias ».
À Kankan, une dizaine de médias animent la vie locale. Des journalistes et techniciens, pour la plupart bénévoles ou volontaires, y travaillent dans des conditions précaires : sans salaire ni primes, mais animés d’une farouche volonté d’informer. Pourtant, malgré cet engagement, le manque de formation professionnelle reste un problème, déplore un vétéran de la presse en Haute-Guinée.
El Hadj Fodé Bangaly Fofana, figure emblématique de la RTG, âgé de 66 ans a intégré la télévision nationale en 1989. Pendant de longues années, sa voix posée a captivé des millions de téléspectateurs. Il a couvert de nombreux événements nationaux et internationaux aux côtés des plus hautes autorités du pays. Aujourd’hui retraité, il consacre son temps à la radio rurale de Kankan et occupe également le poste de représentant régional de la Haute Autorité de la Communication (HAC). Il écoute attentivement les émissions locales et n’hésite pas à prodiguer des conseils aux jeunes journalistes.
Selon lui, la pratique du journalisme ne respecte plus les fondamentaux du métier : éthique et déontologie. Il se souvient de ses débuts :
« Avant d’entrer en studio en 1990, j’ai passé plus de huit mois en formation à la RTG. Aujourd’hui, on saute cette étape cruciale. Voilà pourquoi certains se permettent tout — ils n’ont pas assimilé les bases du métier », regrette-t-il.
À l’occasion de cette journée symbolique, le doyen lance un appel fort à la profession.
« Cette journée est une occasion pour nous de nous regarder en face et de rappeler certains principes de ce métier. C’est une aubaine de faire un pas en arrière et de chercher à comprendre ce que chacun de nous a fait au quotidien dans ce métier pour donner la bonne information à la population. Si on a choisi d’embrasser la carrière de journaliste, il faut être responsable et rien que cela, donner l’information et si nous réussissons à le faire, on réussira à être dans les cœurs de ceux-là que nous informons », indique-t-il.
Récemment, la création d’un collectif de journalistes en soutien au CNRD à Kankan a suscité la polémique. Très critique, El Hadj Fodé Bangaly Fofana n’a pas mâché ses mots : « Quand j’ai appris ça, je me dis que si cela était encore possible dans notre métier. C’est un métier assez noble chers jeunes, donc, si vous voulez avoir de l’argent, faites autre chose et ne salissez pas notre métier ».
Michel Yaradouno, depuis Kankan