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Commémoration du 9 mai : la Russie brandit ses prises africaines

Célébré avec une certaine sobriété en Europe, le 80ᵉ anniversaire de la capitulation de l’Allemagne nazie a, en revanche, donné lieu à une cérémonie faste à Moscou. On retiendra en particulier ce défilé impressionnant, organisé devant une vingtaine de dirigeants étrangers. Parmi les invités de marque, figuraient pas moins de six présidents africains. Un succès diplomatique pour Vladimir Poutine et un indicateur de l’évolution des rapports entre l’Afrique et ses partenaires. En effet, si jadis l’Afrique s’était retrouvée impliquée dans la Seconde Guerre mondiale par le biais des anciennes puissances coloniales occidentales, 80 ans plus tard, c’est aux côtés de Moscou qu’elle semble préférer commémorer l’événement.

Bien sûr, six présidents sur plus d’une cinquantaine que compte le continent, cela peut paraître marginal. Cependant, il y a une vingtaine d’années, dans des configurations similaires, Paris ou Berlin auraient sans doute mobilisé l’essentiel des dirigeants africains. C’est dire qu’il ne faut pas s’arrêter aux seuls chiffres. L’essentiel réside dans la tendance dont ils sont le reflet. Entre l’Afrique et ses partenaires traditionnels, une dynamique évolutive est à l’œuvre, qu’on ne peut ni nier, ni expliquer uniquement par la brouille entre la France et les trois pays de l’AES. La mutation des rapports entre l’Afrique et ses partenaires occidentaux était devenue une nécessité, eu égard à l’injustice et à la condescendance qui les ont toujours caractérisés. Même si certains de nos dirigeants sont aujourd’hui plus enclins à instrumentaliser les véritables motivations du changement pour s’ériger en dictateurs dans leurs pays respectifs. Par ailleurs, la Russie de Poutine n’est pas la seule à profiter de cette reconfiguration en cours. La Chine, la Turquie, l’Inde et plusieurs pays du Golfe en sont également bénéficiaires.

Mais du côté africain, une question essentielle se pose : les conditions sont-elles réunies pour que les nouveaux partenariats à bâtir soient différents de ceux que l’on dénonce aujourd’hui ? Autrement dit, peut-on être sûr que dans trente ans, avec la Russie, la Chine ou n’importe quel autre nouveau partenaire, le quotidien du jeune Africain sera meilleur qu’il ne l’est aujourd’hui ? Il y a bien des raisons d’en douter. La première de ces raisons est la naïveté avec laquelle ces nouveaux partenaires sont abordés. Tout d’un coup, ils sont décrits comme plus « honnêtes » et plus « sincères ». Ce qui constitue en soi une erreur, puisque la morale n’a pas sa place dans les relations entre Etats. Certes, les nouveaux partenaires qui convoitent l’Afrique ont l’avantage de ne pas avoir participé à l’entreprise de colonisation du continent. Mais cela ne garantit en rien une relation plus équitable, car, à la base, seuls les intérêts guident les partenaires, quels qu’ils soient. Au-delà, il faut constater que, dans certains de nos pays, l’éveil et la rupture annoncés se traduisent par une négation des libertés les plus élémentaires, une violation systématique des droits de l’homme ainsi qu’une confiscation du pouvoir et des ressources nationales. Ce qui constitue des signes plutôt inquiétants. En effet, les injustices, les brimades et les frustrations générées par une telle gouvernance ne peuvent que compromettre la stabilité même de nos pays. Car l’injustice ne peut qu’appeler à la révolte.

Au final, si l’Afrique veut véritablement tourner la page d’une histoire marquée par la domination, l’injustice, le vol et la tricherie, elle devra veiller à ce qu’au-delà des discours souverainistes et des postures empreintes de populisme, ses nouveaux partenariats soient construits sur la base d’un rapport de forces plus équilibré, fondé sur le respect mutuel et l’intérêt bien compris de ses peuples. Elle devra aussi examiner ses propres lacunes, sortir ses propres cadavres des placards et lutter contre ses propres démons. Faute de quoi, le continent risque de simplement changer de tuteurs, sans jamais accéder à la pleine souveraineté qu’il revendique et dont il a impérieusement besoin. Par-dessus tout, une Afrique qui exclut le débat ne peut accéder ni au développement, ni au bonheur pour ses fils et filles.

Boubacar Sanso Barry

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