Un souffle de soulagement a parcouru les rangs des victimes, parents et proches du massacre du 28 septembre 2009. Le 26 mars dernier, le gouvernement de la transition, par un décret rendu public, a annoncé la prise en charge de leur indemnisation. Le jeudi 15 mai 2025, ce processus d’indemnisation a officiellement débuté.
Pour ces âmes meurtries, cette décision marque une étape cruciale sur le chemin de la justice et de la réparation. Comme l’exprime avec émotion la présidente de l’Association des Victimes, Parents et Amis (AVIPA), c’est un premier pas vers la guérison des profondes blessures laissées par cette tragédie.
« En juillet 2024, lorsque le verdict du procès concernant les événements du 28 septembre est tombé, nos victimes ont été profondément soulagées. Elles ont enfin été reconnues. Nous avons été réconfortés de savoir que la justice avait reconnu les torts commis au stade », a affirmé Asmaou Diallo.
Portée par cette avancée judiciaire, l’AVIPA n’a cessé de lutter pour obtenir des réparations complètes pour toutes les victimes, multipliant les démarches auprès du ministère de la Justice. Ces efforts ont finalement conduit à la mise en place du processus d’indemnisation.
« Initialement, il était prévu que les condamnés indemnisent les victimes. Cependant, le président Doumbouya a reconnu les difficultés que cela engendrerait et s’est engagé à émettre un décret pour indemniser directement les victimes du 28 septembre », a soutenu la présidente.
L’AVIPA avait estimé les besoins à 3 milliards de francs guinéens pour les femmes victimes de violences sexuelles, 2 milliards pour les familles des personnes disparues ou décédées, et 500 millions pour les victimes de pillages. Finalement, une enveloppe globale de 119 milliards de francs guinéens a été allouée aux 334 victimes reconnues par le jugement.
Selon la présidente de l’association, une commission travaille actuellement à la répartition équitable de ces fonds. Une première indication évoque une somme de 1,5 milliard de francs guinéens pour chaque victime de viol.
« Nos avocats avaient demandé 3 milliards pour les femmes violées, 2 milliards pour les familles endeuillées, et 500 millions pour les victimes de pillages. Aujourd’hui, 119 milliards ont été alloués pour les 334 victimes identifiées. Une commission œuvre pour que chaque catégorie de victime puisse bénéficier de cette aide », a déclaré Asmaou Diallo.
Le processus de distribution obéit à des critères précis : « Vous devez avoir un compte bancaire, une carte d’identité ou tout document prouvant votre statut de victime, et être inscrit dans une organisation œuvrant pour la cause des victimes du 28 septembre ».
Cependant, derrière cette avancée, une frustration demeure : de nombreuses victimes, dont la présidente de l’AVIPA elle-même, n’ont pas été incluses dans cette première vague d’indemnisation. Une situation qui suscite incompréhension et questionnements.
« Beaucoup ne comprennent pas pourquoi seules 334 victimes sont reconnues, alors que d’autres ont témoigné devant les juges sans être prises en compte. Lorsque nous avons évoqué ce problème auprès des magistrats, on nous a dit qu’un appel serait lancé pour permettre à d’autres victimes d’être intégrées et indemnisées. Nous sommes donc dans une attente incertaine », a martelé la présidente de l’AVIPA.
La présidente insiste sur l’importance d’une réparation équitable, qui dépasse le simple aspect financier et touche à la reconnaissance des souffrances endurées.
« On parle de réconciliation nationale, mais il est essentiel que tous soient sur un pied d’égalité. Si l’on indemnise 10 victimes et qu’on en laisse 15, cela peut générer des tensions. Ce que je souhaite, c’est que le gouvernement tienne ses engagements. Il a déjà démontré un courage remarquable en organisant le procès, qui s’est déroulé avec succès. Il doit poursuivre dans cette voie pour que toutes les victimes soient véritablement reconnues et réparées », conclut-elle.
Pour éviter divisions et ressentiment, elle exhorte le gouvernement à maintenir le cap avec la même détermination. Une réconciliation nationale authentique ne peut se faire sans justice intégrale pour toutes les victimes.
Binty Ahmed Touré