Ce devait être un acte somme toute ordinaire, mais qui aura pris les allures d’un événement d’envergure nationale. Ce lundi, dernier jour de dépôt des dossiers de candidature à la présidentielle, la Cour suprême de Conakry a été le théâtre d’une mise en scène soigneusement orchestrée autour du dépôt du dossier du général Mamadi Doumbouya, président de la Transition.
Dès les premières heures de la matinée, les alentours de la haute juridiction, tout comme les principales artères de la capitale, ont été pris d’assaut par une marée humaine. Journalistes, curieux et soutiens du chef de l’État s’y sont massés, arborant T-shirts, banderoles et pancartes à son effigie. Chants, danses et slogans à la gloire du général donnaient à l’événement une dimension presque festive, ponctuée d’appels insistants de leaders de mouvements de soutien réclamant — ou plutôt exigeant — sa candidature.
Ce ballet d’interventions a entretenu tout au long de la journée l’illusion d’un suspense pourtant dissipé depuis plusieurs mois : celui du « oui » tant attendu de Mamadi Doumbouya. Même le déploiement d’un impressionnant dispositif sécuritaire, bien au-delà du périmètre de la Cour suprême, traduisait à lui seul l’importance et le caractère particulier de cette journée.
Dans cette atmosphère électrisée, les dépôts de candidature d’autres figures politiques sont passés presque inaperçus. On notait pourtant la présence de Hadja Makalé Camara du parti FAN, de Dr Faya Millimouno du Bloc Libéral ou encore d’Abdoulaye Kourouma du RRD. Tous venus accomplir la même formalité, mais dans un contexte où l’attention restait tournée vers le général Mamadi Doumbouya.
Le moment où Djiba Diakité, ministre directeur de cabinet à la présidence, est apparu à la Cour suprême a relancé les spéculations. Certains y ont vu le signe annonciateur de l’arrivée imminente du président de la Transition ; d’autres, au contraire, y ont lu la possibilité d’un scénario alternatif, celui d’une candidature par procuration. L’incertitude a brièvement regagné la foule.
Mais en début d’après-midi, le doute a pris fin. L’arrivée de la garde rapprochée du président, lunettes noires et oreillettes vissées, a levé toute ambiguïté. Trente minutes plus tard, le cortège présidentiel faisait irruption, toutes sirènes hurlantes.
Vêtu d’un boubou blanc orné des motifs des quatre régions naturelles et coiffé d’un bonnet assorti, le général Doumbouya est descendu de son véhicule pour saluer brièvement la foule, avant de s’engouffrer dans l’enceinte de la Cour suprême. Dix minutes plus tard, il en ressortait, le visage impassible, adressant un dernier salut depuis le toit ouvrant de sa voiture.
Un geste bref, maîtrisé, mais hautement symbolique. En l’espace d’une dizaine de minutes, Conakry a vécu l’acte final d’un suspense savamment entretenu, où la mise en scène a rivalisé avec la solennité. La capitale s’est figée, suspendue à un seul geste : celui du président de la Transition officialisant ce que tout le monde savait déjà.
N’Famoussa Siby


