Ceux qui en doutaient encore ont désormais leur réponse : Ousmane Sonko a prouvé, ce samedi 8 novembre, qu’il reste le chef incontesté du PASTEF–Les Patriotes, le parti qui l’a porté, avec le président Diomaye Faye, au pouvoir en mars 2024. L’impressionnante mobilisation du stade Léopold-Sédar-Senghor en est la preuve éclatante. Malgré les doutes et les murmures de mécontentement qui montent de certains quartiers de Dakar et d’autres villes du pays, Sonko démontre que sa base militante lui demeure fidèle et que le lien entre lui et la puissante machine politique du PASTEF reste solide. Les images de la foule réunie suffisent à faire taire, au moins provisoirement, les spéculations sur un éventuel essoufflement du mouvement. Mais une question demeure : à qui s’adressait réellement cette démonstration de force ? Aux opposants qui menacent le régime ? Ou bien au président Diomaye Faye lui-même, comme un rappel à l’ordre dans un contexte où certains prêtent aux deux têtes de l’exécutif des divergences latentes ? Sans doute un peu des deux.
L’ampleur de la mobilisation de samedi a de quoi satisfaire Sonko. Pour un leader politique, rien n’est plus rassurant que de constater la ferveur intacte de ses militants. En démocratie, la légitimité populaire reste la plus puissante des armes. Et, par les temps qui courent, rares sont les dirigeants capables de susciter une telle adhésion. Cette victoire symbolique est d’autant plus appréciable pour Sonko qu’elle intervient après des mouvements de protestation dénonçant à la fois ses tendances jugées autoritaires et les promesses sociales non tenues. Beaucoup y voyaient un signe de désaffection, voire un début de rupture entre lui et la jeunesse sénégalaise. Il vient d’y opposer un démenti spectaculaire. Certes, les militants du PASTEF ne représentent pas tout le Sénégal, mais leur poids politique et symbolique demeure indéniable.
Pour autant, tout dans ce rassemblement n’a pas été une réussite. Certains propos tenus sur la tribune, notamment l’appel d’Ousmane Sonko à la dissolution du parti de Macky Sall, suscitent l’inquiétude. Que le chef du gouvernement critique le bilan de l’ancien président, rien de plus normal. Mais appeler à la disparition d’un parti politique relève d’une dérive préoccupante. Une telle attitude risquerait de transformer la quête de reddition des comptes en vengeance politique. Or, ce n’est certainement pas pour cela que les Sénégalais se sont mobilisés.
Enfin, cette démonstration de force pourrait aussi être lue comme un message à l’attention du président Diomaye Faye. Sonko a publiquement nié toute tension avec lui, mais la scène politique n’est pas avare de symboles. Ce meeting pourrait être perçu comme un rappel subtil : le PASTEF, c’est d’abord Sonko, et toute velléité d’émancipation présidentielle face au parti pourrait s’avérer risquée. Une telle rivalité serait désastreuse pour les deux hommes comme pour le pays. Si le président et son Premier ministre ne parviennent pas à transformer la confiance populaire en gouvernance efficace, le rendez-vous du bilan pourrait être cruel. Et tout un espoir qui s’entrouvrait déçu et compromis.
Boubacar Sanso Barry


