La déclaration de candidature faite ce lundi 3 mars par le général Brice Clotaire Oligui Nguema n’est pas un évènement en soi. Tant la participation du président de la Transition à la présidentielle programmée le 12 avril prochain s’est progressivement imposée comme une évidence. Même si l’intéressé lui-même a cultivé un semblant de suspense jusqu’au dernier moment. Le débat doit plutôt porter sur ce qu’on peut espérer d’un homme qui, même s’il s’évertue à se présenter comme neuf, demeure un authentique produit du système façonné par les Bongo.
A l’écart des envolées souverainistes et des discours nationalistes
On retiendra de la transition que le général Brice Clotaire Oligui Nguma conduit depuis le 30 août 2023, qu’elle est globalement restée dans les clous. Se distinguant par une diligence qui a forcé l’admiration, le général qui a déposé Ali Bongo Ondimba s’est également mis à l’écart des envolées souverainistes et des discours aux relents nationalistes de ses homologues du Sahel. Pas un mot de trop contre le néocolonialisme et l’impérialisme des Occidentaux. Conséquence, il est passé incognito sans se faire remarquer de qui que ce soit. Au grand dam de ses opposants dont aucune des revendications n’a trouvé un écho favorable auprès des partenaires du Gabon. Dans un contexte où tout le monde semble avoir oublié le principe de l’Union africaine qui défend un militaire auteur d’un coup d’Etat de se porter candidat à la présidentielle qui parachève la Transition, le président Nguema a été perçu comme un moindre mal. D’autant que les opposants gabonais qui s’agitent sont autant comptables du parcours peu enviable de ce richissime pays logé au cœur de la forêt équatoriale.
Fidèle serviteur de la dynastie Bongo
Mais de loin, on a l’impression que les Gabonais se laissent entrainer un peu par défaut et résignation à la fois. Sans véritable conviction et en l’absence d’un leadership incarnant une véritable opposition, ils avalisent la candidature du président de la Transition, du bout des lèvres. Parce qu’ils ont toujours des raisons de se méfier de ce général qui s’évertue à se démarquer opportunément du bilan des Bongo, alors qu’il a été aide de camp du père et responsable de la Garde républicaine, sous le magistère du fils. Certes, à propos de la durée de la Transition, il est parti pour honorer son engagement. Mais est-ce suffisant pour qu’il passe si allègrement du fidèle serviteur de la dynastie Bongo à la colombe mue par la seule volonté de réaliser les aspirations de ses compatriotes ? C’est sans doute trop facile. Et surtout, ça sent le militaire qui a vite appris le discours séducteur du politique.
Les Gabonais, un peuple averti
Peut-être bien que les Gabonais n’ont pas trop le choix. Le chemin étant balisé pour que le président Brice Clotaire Oligui Nguema, qui a poussé les symboles jusqu’à faire coïncider sa déclaration de candidature à son 50ème anniversaire, soit le président du Gabon, pour au moins les sept prochaines années. Mais quand on a vécu sous le joug de la même famille durant une cinquantaine d’années, on devient forcément un peuple averti. On attend donc des Gabonais qu’ils ne se laissent pas piéger une nouvelle fois, qu’ils demeurent sur leurs gardes et qu’ils veillent au grain. Quand cela sera nécessaire, ils devront dire stop au futur président. En tout cas, ils seront moins excusables s’ils se font aussi avoir par Brice Clotaire Oligui Nguema.
Boubacar Sanso Barry
