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MORT DE GON COULIBALY : et si c’était le prétexte qu’attendait Ouattara ?

Dans n’importe quel autre cas de figure, la mort d’un premier ministre de la trempe d’Amadou Gon Coulibaly aurait tout de suite instauré une sorte de répit dans le débat politique. Pour honorer la mémoire du défunt, on aurait momentanément suspendu la météo politique pour céder la place à la compassion et à la tristesse du moment. Mais le contexte qui prévaut aujourd’hui en Côte d’Ivoire ne permet pas une telle pause. Au contraire, la disparition inattendue du défunt désigné d’Alassane Ouattara est à-même de relancer de manière plus intense le débat sur la succession de ce dernier. Que se passera-t-il désormais ? Le président ivoirien, comme l’entendent certains, mettra-t-il à profit cette tragique occasion pour remettre en cause sa promesse de passer le relai à la nouvelle génération ? Ou bien continuera-t-il dans la logique de s’en tenir à ses deux mandats qui s’achèvent en octobre prochain ? Au-delà, l’on devrait aussi chercher à déterminer la part de responsabilité d’Alassane Ouattara dans la mort de son poulain. Il est vrai que la question peut paraître tout aussi paradoxale que cynique. Mais dans sa volonté d’imposer Amadou Gon Coulibaly comme son dauphin, Ouattara ne l’a-t-il pas forcé à revenir dans le ring plus tôt qu’il le fallait ? En somme, Gon Coulibaly n’a-t-il pas sacrifié sa santé sur l’autel des ambitions politiques, quelque peu démesurées ?

Les calculs politiques au détriment de la santé

Ces questions paraissent d’autant plus légitimes que le président ivoirien a clairement vécu l’évacuation, le 2 mai 2020, de son premier ministre en France comme une pression. Le prenant à contre-pied, ce malaise ayant obligé son dauphin désigné à se faire hospitalisé en dehors du pays en pleine pandémie de Covid-19, Alassane Ouattara l’a mal vécu. Lui qui avait conscience que son choix porté sur Amadou Gon Coulibaly ne fait pas l’unanimité au sein de la Coalition du Rassemblement des Houphouëtites pour la démocratie et la paix (RHDP) se sera donc évertué à relativiser le mal dont souffrait ce dernier. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que la raison officielle de l’évacuation du désormais ancien premier ministre était un laconique « contrôle médical ». Il avait par conséquent hâte que celui-ci revient pour rassurer aussi bien ceux de son camp que ceux qui n’en font pas partie. Ainsi, 10 jours seulement après le départ de son protégé pour la France, le président ivoirien avait étalé sur tous les médias ivoiriens, y compris les réseaux sociaux, la visioconférence qu’il a eue avec ce dernier. Le message derrière consistait à minimiser l’ampleur du malaise de Joker sur qui il avait tout misé. Aussi, peut-on légitimement se demander si cette pression n’aura pas finalement poussé Amadou Gon Coulibaly à revenir un peu trop tôt dans la bataille ? Etait-il véritablement apte à reprendre du service ? Revenu le 2 juillet dernier, il meurt six jours après, à la suite d’un malaise qu’il a eu au cours du tout premier ministre auquel il participe depuis son retour. N’eut-été l’enjeu électoral prochain, n’aurait-il pas pris davantage de temps pour se reposer en France ? Redoutant que son séjour prolongé à l’extérieur ne renforce le scepticisme sur sa capacité et son aptitude à incarner le bon successeur, lui et son mentor n’ont-ils pas un peu forcé sur le destin ?

Ouattara prendra-t-il toujours la retraite ?

Ces questions, Alassane Ouattra, lui, n’aura pas le temps de se les poser. Parce que le président ivoirien est déjà en proie à d’autres interrogations tout aussi cruciales. Que faire maintenant qu’il ne peut plus compter sur celui qu’il avait librement choisi pour lui succéder ? Deux options s’offrent à lui. La première consiste à se choisir un autre successeur, s’il veut, comme il s’y est toujours engagé, prendre la retraite. Il sera dans ce cas confronté au choix de l’oiseau rare. Et le défi est d’autant plus difficile qu’en théorie, il ne dispose que d’à peine trois mois. Or, des sources disent qu’il n’avait pas envisagé un plan B. Il est vrai que le nom de son actuel ministre de la Défense, Hamed Bakayoko est souvent revenu depuis qu’avec la maladie de Gon, l’éventualité que celui-ci ne puisse pas lui succéder trotte dans les têtes. Mais c’est à se demander si le président ivoirien fait-il suffisamment confiance à Bakayoko. En particulier, dans l’entourage d’ADO, on n’est pas certain qu’une fois qu’il aura repris les manettes du pouvoir, l’actuel ministre de la Défense se montrera aussi loyal que l’aurait fait Gon Coulibaly.  Par ailleurs, aux yeux de la communauté internationale, Hamed Bakayoko est perçu comme une personnalité dont le parcours n’est pas absolument irréprochable. Hormis ces considérations touchant au profil de son successeur, le président ADO peut envisager prendre la retraite sans grande crainte que ses adversaires ne puissent s’en emparer. En effet, il n’est pas évident qu’à 86 ans, Henri Konan Bédié soit une menace particulièrement sérieuse. D’un autre côté, même s’il venait être autorisé à revenir au pays – ce qui est peu probable – Laurent Gbagbo n’est plus le redoutable leader socialiste capable de drainer des foules. Quant à Guillaume Soro, le pouvoir ivoirien semble avoir trouvé de quoi l’éloigner du pays pendant un bon moment. Aussi, quel que soit celui qui portera les couleurs du RHDP, il y a de fortes chances qu’il l’emporte aux prochaines élections.

La mort de Gon Coulibaly, un prétexte tout trouvé ?

Pourtant, Alassane Ouattara pourrait ne pas se laisser convaincre par ce pronostic favorable son camp. De fait, ces dernières semaines, des rumeurs ont laissé entendre qu’il regrettait son engagement de transmettre le sceptre du pouvoir à un autre. En particulier, la perspective d’une nouvelle candidature de Henri Konan Bédié l’aurait persuadé de reconsidérer son engagement. Il est vrai qu’il s’est toujours davantage prononcé pour une alternance générationnelle. Une alternance en vertu de laquelle ceux de sa génération, Bédié et Gbagbo en particulier, s’effaceraient en faveur de plus jeunes compétiteurs politiques. Mais comme on le sait désormais, le Sphinx de Daoukro n’est pas encore prêt à raccrocher les gants. Ouattara, de son côté, guettait l’occasion de reprendre les siens. Dans cette perspective, la mort d’Amadou Gon Coulibaly est le prétexte tout trouvé. Invoquant l’absence d’un successeur, le président ivoirien pourrait enfin faire comme son homologue guinéen, à savoir écouter ses partisans qui le convainquent de briquer un troisième mandat. Bien sûr, ce serait alors regrettable pour la Côte d’Ivoire et son image. Mais Alassane Ouattara pourrait facilement se laisser convaincre par l’adage selon lequel, ‘’on n’est jamais mieux servi que par soi-même’’. Rien que pour cela, la mort de Gon Coulibaly est une trahison pour la Côte d’Ivoire.

Boubacar Sanso BARRY

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