Ce ne sont pas encore les aveux. Mais on avance probablement dans la bonne direction. En effet, pour la première fois depuis le début de sa comparution, dans le cadre du procès des massacres du stade du 28 septembre, le capitaine Moussa Dadis Camara, a admis un lien entre sa menace de briguer la présidentielle et la manifestation qui a été réprimée dans le sang. Mais pour se dédouaner, l’ancien chef de la junte plaide l’inexpérience. Inexpérience dont son entourage aurait profité pour le piéger, selon lui.
Dans un premier temps, dit-il pourtant, sa menace de se présenter à l’élection présidentielle qui devait sanctionner la transition de 2010 était dictée par une amertume somme toute humaine. Nullement méchante, elle résultait, selon lui, de la pression et du peu de considération que les acteurs politiques avaient fini par lui témoigner. « Lorsque vous vous sacrifiez pour une nation, vous prenez le pouvoir. J’ai pris le pouvoir en appelant tous les leaders politiques, même ceux qui étaient à l’étranger. J’ai invité tous ces leaders au camp Alpha Yaya Diallo. A un certain moment donné, ces mêmes leaders ne voulaient plus me reconnaître. Alors, je dirais que ce n’était pas une réaction méchante. J’ai voulu simplement dire que nous sommes guinéens, on n’est pas né militaire, on n’est pas né magistrat ou avocat. ‘’Mettez de l’eau dans votre main’’, c’était pour qu’ils se calment », explique l’ancien président du CNDD.
Mais dès qu’on aborde la question des mouvements de soutien à sa candidature dont ‘’Dadis doit rester’’ ou encore ‘’Dadis ou la mort’’, l’ancien président fait appel à la thèse complotiste. « C’était une stratégie mise en place en vue de me créer des ennuis. Même à Coronthie ici, ce sont les mêmes éléments qui travaillaient avec moi, mais qui travaillaient également avec d’autres personnes. Cette machine était là. Ils étaient avec moi mais étaient parallèlement avec leurs hommes », indique-t-il.
Et bien sûr, son ancien collaborateur, Sékouba Konaté, est l’incarnation de ce complot dont il se dit avoir été victime. Du coup, quand l’ancien ministre de la Défense a dit à Fria et à Macenta que le capitaine Dadis serait condidat, « c’était une façon de m’opposer aux leaders politiques et à la population », dit-il. Quant aux mouvements de soutien, leur création avait pour but de « mettre de l’huile sur le feu. C’étaient les vraies prémices du complot. Les gens auxquels j’ai eu confiance comme le général Sékouba Konaté m’ont trahi. Lorsque vous l’entendez parler, vous allez dire que c’est l’homme prêt à mourir pour moi, mais au fond, c’est faux », accuse Moussa Dadis Camara.
L’avocat qui l’interrogeait de demander alors si Moussa Dadis n’aurait pas pu déjouer ce complot en faisant diffuser un communiqué à la télévision nationale pour annoncer solennellement qu’il n’est pas candidat. « C’est l’inexpérience, rien d’autre que ça. Je m’en suis rendu compte tard. En toute chose, il y a l’inexpérience des choses. Cela est propre à tous les êtres humains. Sinon, tout ce que vous dites, c’est réel, c’est vrai. Je n’en disconviens pas. Mais mon entourage et l’inexpérience font qu’aujourd’hui, je suis devant le tribunal, après toute la volonté que j’ai eue pour cette nation », explique-t-il sur le ton du regret.
Fodé Soumah