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Dépouille Djenè Kaba : Alpha Condé étend le cercle des adversaires à la France

A coup sûr, Alpha Condé est affecté par la disparition de Hadja Djénè Kaba Condé, son ex-épouse, décédée le 8 avril dernier à l’hôpital américain de Paris. En dépit de tout ce que l’on entend aujourd’hui sur les relations que les deux entretenaient à l’intérieur du couple présidentiel, on ne peut pas dire que toutes les réactions de l’ancien président relèvent d’une simulation. Mais fidèle à lui-même, l’ancien président en profite certainement pour livrer aussi une bataille politique. Au lieu de se laisser affliger par la douleur et la peine, il s’évertue plutôt à retourner cette triste circonstance contre ses adversaires. Adversaire au nombre desquels se retrouve la France qu’il ajoute désormais à la liste de ceux qui voudraient lui voler la dépouille de feue Hadja Djénè Kaba Condé. La référence au pays de Macron, dans l’échange avec sa belle-fille dont l’enregistrement est devenu viral sur les réseaux sociaux, est une communication dont les objectifs vont au-delà de la controverse autour du corps de l’ancienne première dame.

S’adressant à sa belle-fille, Gnalen Kaba, avec qui il échangeait au téléphone, Alpha Condé lance à cette dernière : « Ça va être un scandale et c’est ton nom qui va se gâter. Parce que toute l’Afrique va être au courant que l’Elysée est intervenu. Qu’est-ce que l’Elysée a à faire dans les affaires guinéennes ? La Guinée de Sékou Touré qui a dit non à la France ». Plus loin, ajoute-t-il : « Partout aujourd’hui, on est en train de chasser la France. Comment la Guinée qui a dit NON, va se retrouver dans ça. L’Elysée se mêle de l’envoi du corps ».

Au-delà de l’époux éprouvé, c’est un Alpha Condé drapé dans le costume du nationalisme qui s’exprime. Et dans ses propos, on a tout à la fois les relations difficiles qu’il entretenait avec la France avant sa chute, la convocation du sentiment anti-français, plutôt répandu dans nombre d’anciennes colonies françaises en Afrique et une subtile dénonciation des rapports « cordiaux » que la même France entretient aujourd’hui avec le colonel Mamadi Doumbouya. Et l’objectif espéré est de profiter de ce moment de deuil, qui touche particulièrement les militants, pour faire poindre une opposition contre l’axe Paris-Conakry. Et pour arriver à cette fin, il n’hésite pas à rappeler le « Non » de Sékou Touré au général de Gaule. Un rappel destiné à réveiller une certaine fierté.

 

Encore qu’Alpha Condé ne procède pas que par la dénonciation de la France. Il use aussi de son identification à la Guinée, à l’Islam et au Manding. « Gnalen, nous ne sommes pas Français, nous sommes Guinéens, Musulmans et nous sommes Mandingues », souligne-t-il à l’intention de son interlocutrice.

Là il se situe à l’autre bout de la chaine. Pour légitimer le rejet de la France qu’il appelle de ses vœux, Alpha Condé a estimé qu’il lui fallait marteler son identité guinéenne, réitérer cette dernière de manière à ne laisser aucun doute. Parce que justement, certains pourraient interroger l’authenticité d’un tel nationalisme de la part de quelqu’un qui a eu la nationalité française et qui s’était délecté de la visite d’Etat qu’il a effectuée en France, du temps de François Hollande.

C’est dire qu’à côté du deuil qui est le sien, il a les yeux rivés sur ses objectifs politiques. Et toute sa singularité.

Boubacar Sanso Barry

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