A l’exception de la lecture du saint Quran organisée tôt ce jeudi à la grande mosquée de Kankan, par quelques membres de l’administration publique et de la famille présidentielle et des soutiens affichés du CNRD, pour prier en faveur d’une « transition réussie », rien dans l’atmosphère qui prévaut ce 5 septembre dans le Nabaya, ne laisse croire que le pays célèbre l’An III de l’arrivée au pouvoir des militaires. Dans cette ville natale du général Mamadi Doumbouya mais qui a été un fief du président Alpha Condé, les citoyens vaquent paisiblement à leurs activités, en raison, disent-ils d’un contexte socioéconomique qui les étreint. Du marché Lofeba à celui de Sogbè, en passant par quelques cafés de la ville, le correspondant du Djely a rencontré des citoyens plus préoccupés par la quête du quotidien.
Il y a exactement trois ans que le général Mamadi Doumbouya, à la tête du Groupement des Forces spéciales, s’emparait du palais Sékoutouréyah, y compris le président Alpha Condé. Et c’est peut-être cette dimension de la journée du 5 septembre 2021 que les Kankanais gardent encore davantage en mémoire.
En tout cas, en ce jour-anniversaire, Kankan n’est pas à la fête. Salif Diallo, la trentaine, est conducteur de tricycle. Quand nous l’avons abordé, juste devant le siège local de Cellcom, au rond-point Mbalia, il a indiqué que l’atmosphère n’est guère à la fête. « On fête quand on a de quoi se manger et l’argent. Qui ne connaît pas la situation actuelle du pays ? Je préfère me concentrer sur mon tricycle que d’aller à la fête. Quand j’aurai l’argent, je vais partir et si ça trouve que c’est fini, on a attendu une autre fois », lâche-t-i.
Au marché Sogbè, le brouhaha qui vous accueille est celui des jours ordinaires. Les vendeuses pleurent davantage la rareté des clients. « J’aime bien Mamadi Doumbouya parce qu’il a réalisé des choses depuis son arrivée. Mais il me faut venir ici pour nourrir mes enfants. Actuellement, c’est difficile de trouver un client car chacun pleure », confie Hadja Mariama, une des vendeuses.
Même morosité dans un café où s’est rendu le correspondant du Djely. Les jeunes attablés sirotent leur café, alors que d’autres s’échinent à trouver la combinaison gagnante dans les jeux de hasard. La fête, Moustapha Bangoura aurait bien voulu y aller. Mais « on va d’abord chercher (l’argent), la fête viendra plus tard. Nos ventres sont vides. Donc, il me faut aller au travail », lâche-t-il.
Michel Yaradouno, Kankan pour ledjely.com