Lancé le 15 avril dernier sur toute l’étendue du territoire national, le recensement biométrique à vocation d’état civil connaît déjà de nombreuses difficultés. À Siguiri, plusieurs dysfonctionnements entravent le bon déroulement de l’opération : absence de registres pour les jugements supplétifs, non-paiement des membres des Commissions Administratives de Recensement (CAR), et conditions précaires pour les jeunes recrutés en renfort dans les quartiers et districts.
Ce mercredi 7 mai 2025, Mouloukou Sanoh, membre d’une CAR locale, a accepté de témoigner sur les obstacles rencontrés sur le terrain.
« Depuis le début de ce recensement, nous faisons face à de nombreux problèmes. Les citoyens ne possèdent pas les documents demandés, notamment le jugement supplétif et sa transcription, qui doivent remplacer l’extrait de naissance. Obtenir ces documents est devenu un véritable parcours du combattant. Devant l’afflux de demandes, la justice a été débordée. Des jeunes ont alors été recrutés dans les quartiers, moyennant une promesse de compensation, pour remplir les registres des jugements supplétifs et leurs transcriptions. Mais depuis qu’ils ont commencé, ces jeunes travaillent nuit et jour sans avoir rien reçu, et sans même savoir combien ils doivent percevoir », déplore-t-il.
Il poursuit en décrivant les conditions de travail difficiles des membres de sa commission :
« Les membres des CAR, que nous sommes, ne sont pas en nombre suffisant. Dans notre quartier, par exemple, une seule CAR composée de 4 personnes a été déployée pour gérer 4 machines de recensement. Chaque agent est donc affecté à une machine et doit faire le travail de quatre personnes. Malgré ces efforts énormes, nous n’avons reçu aucune prime à ce jour. Si l’État ne prévoit rien pour remédier à cette situation, le jour où nous déciderons d’arrêter le travail, c’est tout le recensement qui s’arrêtera. Pourtant, à ce rythme, même la moitié de la population n’a pas encore été recensée, et il ne reste plus beaucoup de temps », a-t-il averti.
À Siguiri, la grogne monte alors que les délais s’amenuisent. Entre désorganisation, manque de moyens et absence de reconnaissance, le recensement biométrique pourrait bien se heurter à une crise majeure.
Ibrahima Camara, depuis Siguiri